GISCARD A T IL COUPE UN INNOCENT EN DEUX

Publié par
joaquin Modérateur

GISCARD A-T-IL COUPE UN INNOCENT EN DEUX



Jean-Baptiste Rambla vient d’être condamné à la réclusion perpétuelle pour avoir assassiné une jeune femme en 2017. En fait, il était en récidive, car il avait déjà tué une autre femme en 2004. Sur le procès a plané sans cesse le fantôme d’un autre homme : Christian Ranucci, qui a été condamné et exécuté en 1976 pour le meurtre d’une petite fille, Maria Dolores Rambla, la sœur de Jean-Baptiste. Giscard, président à l’époque, avait refusé de le gracier, ce qui a conduit Ranucci à l’échafaud.

Pourtant, Giscard , lors d’une conférence de presse en 1974 déclarait un mois avant son élection à la présidence de la république : « « J’éprouve une aversion profonde pour la peine de mort. » . On pouvait donc espérer que durant son mandat, il n’y aurait aucune exécution . En fait, Giscard refusa sa grâce à 3 hommes, dont Ranucci. Il s’était rendu compte que la population n’était pas contre la peine de mort, et il ne voulait pas perdre une partie de son électorat .

Le cas le plus sombre est celui de Christian Ranucci. Je vous en dis 2 mots, mais il faudrait des tomes et des tonnes de livres pour parler de cette affaire. Pour ceux qui veulent en savoir plus sur cette affaire, je vous renvoie à deux livres :


L’un qui soutient la thèse de la culpabilité : Gérard Bouladou, L'Affaire du pull-over rouge : Ranucci coupable ! : un pull-over rouge cousu… de fil blanc,
Un autre qui innocente Ranucci : Le pull over rouge, de Gilles Perrault

Ce dernier livre a connu un énorme succès.

Je résume donc l’affaire Ranucci : Maria Dolorés Rambla, âgée de 8 ans, et son petit frère Jean-Baptiste, âgé de 6 ans, jouent au bas de l’immeuble où ils habitent, aux Chartreux à Marseille, quand un homme arrête sa voiture devant eux et commencent à leur parler. Il éloigne le petit Jean sous prétexte qu’il a perdu son chien et qu’il aimerait que Jean le retrouve. Il en profite alors pour enlever Maria Dolores. Celle-ci sera retrouvée morte quelques jours plus tard, à une vingtaine de kilomètres de là, dans un bois. Des témoins ayant vu roder Christian Ranucci à cet endroit juste après l’enlèvement (à une heure où le meurtre a pu être commis), Il est tout de suite arrêté, puis mis en examen, jugé et condamné à mort. Il sera exécuté le 28 juillet 1976, après que Giscard ait refusé sa grâce.

2 ans après son exécution, Gilles Perrault publie un livre « le Pull over rouge », qui connait un énorme succès, et qui avance de nombreux arguments en faveur de l’innocence de Ranucci. La polémique ne cessera alors d’enfler, jusqu’à maintenant. Il y aura plusieurs demandes en révision du procès, mais aucune n’aboutira. Donc, à ce jour, la vérité judiciaire, c’est que Christian Ranucci est coupable de meurtre sur la personne de Maria Dolorès, et qu’il a été exécuté pour ce crime en 1976.

Pour comprendre l’impact psychologique qu’a pu avoir cet évènement tragique sur Jean-Baptiste Rambla, il faut savoir que celui-ci est le principal témoin de cette affaire, et que son témoignage va plutôt dans le sens de l’innocence de Ranucci. En effet, il ne reconnait pas Ranucci lors d’une confrontation policière et il ne reconnait pas non plus la voiture de Ranucci, une peugeot. Lui parle plutôt d’une Simca. Son père, qui est assez têtu et qui, quant à lui, croit dur comme fer à la culpabiité de Ranucci, n’aura cesse de lui reprocher cela tout au long de sa vie. Cela marquera à jamais le petit Jean, et cela expliquera qu’il devienne lui-même un meurtrier lorsqu’il sera adulte. C’est ainsi tout au moins qu’il explique ses crimes odieux, dont l’un n’a même pas de mobile.

Je me suis passionné pour cette affaire en 2006 : j’ai lu tous les témoignages, tous les journaux de l’époque traitant l’affaire, les livres (les deux cités plus haut), les sites internet traitant de cette affaire, les forums… Je me suis rendu longuement sur les lieux de l’enlèvement ainsi que sur les lieux où la petite fille a été assassinée et où on a retrouvé son corps sans vie.

Après 2 ans d’investigation, je n’ai pas pu me faire une opinion tranchée. En fait, il y a des éléments à charge ainsi qu’à décharge .

A charge : Des témoins ont vu Christian Ranucci rôder aux alentours du lieu où a été découvert le cadavre de la victime, et à une heure où le crime a pu avoir lieu, soit quelques heures après l’enlèvement. Ils ont même noté sa plaque d’immatriculation, ce qui a permis de l’appréhender. Après, lors de la reconstitution, Ranucci a pu amener les policiers tout droit et sans hésitation vers l’arme qui a servi à tuer Maria Dolorès, un couteau qu’il avait bien caché dans une tourbe non loin du lieu où on découvert le corps de la victime. Dans ses aveux, il affirme qu’il l’a tué la petite fille avec un couteau et qu’il a ensuite caché le couteau non loin de là. Ses aveux sont donc corroborés lors de la reconstitution. On trouve des traces de sang sur le couteau, et une analyse permet d’établir qu’il s’agit d’un sang du même groupe sanguin que la petite fille (ainsi que celui de Ranucci, car plus tard, revenant sur ses aveux, il dira qu’il y avait du sang parce qu’il s’était coupé lui-même). Malheureusement, il n’existait pas de test ADN à l’époque.

A décharge : les deux témoins de l’enlèvement n’ont reconnu ni Christian Ranucci, ni sa voiture. Nous avons déjà parlé du témoignage de Jean-Baptiste Rambla. Mais il y a un autre témoin : un garagiste qui travaillait non loin du lieu où Maria Dolorès a été enlevé, et qui a vu la scène se dérouler à une centaine de mètres. Lui non plus ne reconnait pas Ranucci, et concernant la voiture, il dit même qu’il s’agit d’une Simca 1100, alors que Ranucci possède une peugeot 304. Si on peut douter de la valeur d’un petit garçon de 6 ans concernant les marques de voiture, c’est plus difficile à admettre en ce qui concerne un garagiste.

Il pouvait donc y avoir un doute lors du procès, car tout ce que j’ai dit précédemment a été répété plusieurs fois lors du procès. Et le doute ne profite-t-il pas à l’accusé ?

En tout cas, un chose est sûre : Giscard, lui qui avait une « aversion profonde pour la peine de mort » n’a pas hésité longtemps. Il a refusé la grâce à Ranucci, et sa tête a roulé quelques heures plus tard.

On a pas tari d éloges lors de son décès le 2 décembre 2020 (emporté par le Covid). Il est bon de rappeler les zones obscures de ce personnage.



Joaquin Gonzalez

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Joaquin Gonzalez

Master 1 en droit des affaires

Conseil d'entreprise



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Publié par
Isidore Beautrelet Administrateur

Bonjour

Cette affaire est effectivement passionnante !
Merci pour cet article très bien rédigé

Comme tu le dis, elle fait partie des zones d'ombres du mandat de VGE.
Le risque d'erreur judiciaire étant important, VGE n'aurait pas dû hésiter à utiliser son droit de grâce pour transformer la peine de mort en condamnation à perpétuité.


Et le pire, c'est qu'il ne regrette rien

https://www.lepoint.fr/politique/giscard-d-estaing-ne-regrette-pas-d-avoir-refuse-sa-grace-a-ranucci-09-10-2010-1247062_20.php

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