Questions sur signature, règlement intérieur, etc

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Bonjour à tous.
Je suis un peu un étranger par ici, car je ne suis pas étudiant en droit, je suis en Master 1 à l'IUFM pour devenir enseignant et dans le cadre de ces études, je prépare un dossier sur la question du règlement intérieur en établissement scolaire.
Le dossier n'est pas du tout orienté sur les questions du droit ou des lois, mais j'aimerais y faire une brève incursion, afin de l'enrichir, et surtout éviter d'y dire des bêtises.

C'est pourquoi je me permets de venir vous embêter un peu, en espérant que mon sujet ne sera pas mal perçu. Et en plus, comme je n'y connais pas grand chose, j'ai très peur de poster dans au mauvais endroit, veuillez accepter mes plates excuses si je me suis trompé!

Je pense que mes questions ne vous prendront pas beaucoup de temps, en tous cas je n'ai pas besoin de très longues réponses puisque ce n'est pas l'objet du dossier.

Dans la plupart des collèges/lycées, le règlement intérieur est soumis à une signature (parfois seulement celle de l'élève, parfois celle de l'élève et des parents), parfois même renforcée par la mention "lu et approuvé". J'ai toujours été interloqué par cette méthode, car bien sûr, en réalité, on ne demande pas vraiment leur avis aux élèves.
Parfois, il n'est même pas laissé aux élèves le temps de lire le règlement: ils doivent signer tout de suite.
Certains élèves refusent parfois de le signer, mais sont bien sûr très mal reçus et on leur explique qu'en réalité, ils n'ont pas le choix.

Je n'ai pas d'avis tranché, et surtout l'objet de mon travail n'est pas d'en donner un, mais de mener une réflexion, d'interroger des gens, d'exposer quelques faits.

Bien sûr, mener ces problématiques aux enjeux très mineurs à l'échelle de questions juridiques peut sembler un peu absurde, et dans la pratique, ça l'est. Mais dans le cadre d'une réflexion universitaire, c'est ce que j'essaie de faire.

Ca m'amène à ces quelques questions:
(bien sûr, ce n'est pas grave si vous ne répondez pas à tout, je sais qu'il y en a beaucoup, déjà quelques réponses ou éléments de réponse m'aideraient)

- Une signature faite sans que l'on n'ait pu lire le document que l'on signe a-t-elle une valeur?
- "Peut-on" obliger quelqu'un à signer sans lui laisser le temps de lire?
- Une signature a-t-elle de la valeur si "on n'a pas le choix" ?
- La question suivante en découle: sous quelles conditions peut-on estimer "qu'on n'a pas le choix" ? On peut estimer que l'élève et ses parents ont le choix de refuser le règlement intérieur et de s'inscrire dans un autre établissement, mais cela pourrait poser de grosses difficultés (éloignement, rentrée déjà passée, etc - cette situation est absurde je sais, c'est juste de la théorie).
- Certains enseignants exposent que l'inscription à l'établissement a valeur d'acceptation du règlement. Cependant, il n'est pas possible de lire le règlement d'un établissement avant de s'y inscrire. Que peut-on dire sur ce point? Et aussi, dans ce cas, la signature est logiquement inutile?
- Certains enseignants ou éducateurs présentent le règlement intérieur comme un "contrat" que l'élève doit signer (ce qui laisse supposer qu'on lui laisse le choix). Mais un règlement intérieur n'est pas un contrat, je crois?
- Certains enseignants argumentent le fait que la signature vaut pour la lecture du règlement intérieur, mais pas pour son acceptation (puisque l'avis de l'élève n'est pas demandé). Dans ce cas, la formulation "lu et approuvé" est-elle acceptable? Le sens donné à la signature n'est pas défini sur le document qu'est le règlement intérieur, est-il correct de l'interpréter comme le font ces enseignants?

Merci d'avance à ceux qui accepteront de passer un peu de temps sur ces questions très anodines, mais qui me seront utiles pour la construction de mon dossier.
Si possible, j'apprécierais beaucoup quelques citations ou liens vers les textes de lois concernés afin de les placer en annexes dans le dossier. Mais sinon ce n'est pas grave.
Je ne veux pas vous demander beaucoup de temps, quelques réponses concises (une phrase chacune), sans entrer dans le détail, peut-être quelques liens tout simplement, suffiraient pour beaucoup m'aider.

Je précise que j'ai déjà fait des recherches sur le sujet, mais en vain (je n'ai peut-être pas cherché là où il fallait, c'est la première fois que je me penche sur ce genre de questions).

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Camille Intervenant

Bonjour,
Tout ce que vous décrivez est très inquiétant. Tous les gens que vous décrivez sont censés avoir pour objectif principal de former nos chères têtes blondes et censés leur apprendre leurs droits et leurs devoirs dans une société harmonieuse ?
A la limite… terrifiant !

- Une signature faite sans que l'on n'ait pu lire le document que l'on signe a-t-elle une valeur?
Oui. Une signature est une signature (*).
- "Peut-on" obliger quelqu'un à signer sans lui laisser le temps de lire?
Non, bien sûr. C'est même idiot, absurde et "contre-productif" dans le cas présent puisqu'elle perd toute valeur pédagogique, forcément. Et bel exemple pour notre jeunesse !
- Une signature a-t-elle de la valeur si "on n'a pas le choix" ?
Oui (*)

(*) Sous réserves qu'on ne vous pas forcé à signer sous la menace, avec une mitraillette dans le dos.

Code civil
Article 1109
Il n'y a point de consentement valable si le consentement n'a été donné que par erreur ou s'il a été extorqué par violence ou surpris par dol.

Article 1112
Il y a violence lorsqu'elle est de nature à faire impression sur une personne raisonnable, et qu'elle peut lui inspirer la crainte d'exposer sa personne ou sa fortune à un mal considérable et présent.
On a égard, en cette matière, à l'âge, au sexe et à la condition des personnes

Article 1116
Le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces manoeuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté.
Il ne se présume pas et doit être prouvé.

Article 1117
La convention contractée par erreur, violence ou dol, n'est point nulle de plein droit ;
(..)



On peut estimer que l'élève et ses parents ont le choix de refuser le règlement intérieur et de s'inscrire dans un autre établissement
Voilà.

Vous remarquerez qu'il en est de même lorsque vous achetez un appartement dans une copropriété. Son règlement doit vous être remis avant la signature de l'acte de vente, règlement qu'on ne vous demande même pas de signer, mais le simple fait de signer l'acte de vente sous-entend que vous admettez vous plier aux règles de ce règlement en achetant ce bien dans cet ensemble immobilier. Si le règlement ne vous convient vraiment pas, vous achetez ailleurs. Point.



Certains enseignants argumentent le fait que la signature vaut pour la lecture du règlement intérieur, mais pas pour son acceptation (puisque l'avis de l'élève n'est pas demandé). Dans ce cas, la formulation "lu et approuvé" est-elle acceptable? Le sens donné à la signature n'est pas défini sur le document qu'est le règlement intérieur, est-il correct de l'interpréter comme le font ces enseignants?
Et ce sont des enseignants qui, comme leur nom l'indique, sont censés "enseigner" les règles de la société à nos chères têtes blondes ??? Effarant !!!
Par défaut et jusqu'à preuve du contraire, une signature "en bas d'un parchemin" engage son auteur sur le texte qu'il a signé. Sinon, c'est la porte ouverte à tous les abus.

Je résume, en gros, selon moi :
Ceux qui forcent quelqu'un à signer un document sans lui laisser la possibilité de le lire avant de signer sont indignes de travailler dans l'enseignement.
Ceux qui disent qu'une signature n'a aucune valeur, sous un prétexte quelconque, itou.
Sans parler de la "valeur pédagogique" de tout ça, qui ne fait qu'en rajouter une couche.
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Hors Concours

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Super, merci beaucoup, tes réponses me sont d'une grande aide!

Je me permets de reposer la question à propos de la notion de "contrat". On trouve ce terme présent dans de nombreux règlements intérieurs, et beaucoup d'enseignants présentent le règlement comme un contrat.
Or, je crois bien que ce n'en est pas un (je n'ai pas de connaissances précises sur ce qu'est un contrat, mais la présentation globale n'y ressemble pas, le règlement ne contient pas réellement d'engagement mais plutôt une liste de points interdits ou autorisés, et l'élève est le seul parti à s'y engager/à signer). Pourrais-tu, s'il te plait, m'éclairer sur ce point?
Ce n'est pas que je "voudrais" que le règlement en soit un, mais je crois que la présentation qui en est faite aux élèves, par l'usage de ce terme, est fausse, et induit l'élève en erreur (cette présentation un peu démagogique fait penser à un accord volontaire, à un engagement des deux partis, à une sorte de dispositif presque démocratique, ce qu'il n'est pas).

Encore une fois merci beaucoup.

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Camille Intervenant

Re,
Ben, à mon humble avis, c'est l'art et la manière de pratiquer la technique de l'amalgame, d'une part, par une interprétation un peu abusive du titre III du code civil et d'autre part, parce qu'on s'imagine, d'un point de vue pseudo-pédagogique, qu'il est toujours préférable d'obtenir l'adhésion de sa victime, en parlant de "contrat" plutôt que de règlement (provoquer une forme de syndrome de Stockholm, en quelque sorte). D'ailleurs, à une époque, on parlait de "forme de deal entre toi et l'école", peut-être par allusion au New Deal de Roosevelt (terme étant devenu un peu péjoratif, de nos jours, par risque de confusion avec les trafics de drogues).
Mais, pour moi, non, un règlement intérieur n'est pas un contrat, du moins pas un contrat classique, au sens usuel du terme.

Par analogie (un peu risquée, j'en conviens), si vous commettez un crime ou un grave délit, on vous enverra en prison. Dans cette prison, il existe un règlement que vous serez tenu de respecter. Est-ce un contrat, au sens de ces enseignants ?
Vous vous doutez bien que...

- Je refuse de signer le règlement intérieur de la prison. Alors, je peux m'en aller ? Je peux rentrer chez moi ?

- Comment ça, je n'ai pas respecté le règlement ? Mais, j'l'ai pas signé, votre contrat !!! Donc, non ! Je n'irai pas au mitard !!!


... sont des arguments qui ne marcheront pas.


De même qu'on peut voir les lois et les règlements comme des "contrats" passés entre le pouvoir législatif et le reste de la population, laquelle est censée être tenue de les respecter (puisque "Nul n'est censé ignorer la loi" !). Or, vous noterez qu'on n'envoie pas à chaque citoyen deux exemplaires de chaque journal officiel "pour solliciter votre approbation et votre signature, dont un à retourner au ministère de l'intérieur, place Beauvau (75800 PARIS CEDEX 08), avec la mention Lu et approuvé"...
Pourtant, si vous brûlez un feu rouge sous les yeux de la maréchaussée...
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C'est, accessoirement, le PV qu'on vous demandera de signer...

par l'usage de ce terme, est fausse, et induit l'élève en erreur (cette présentation un peu démagogique fait penser à un accord volontaire, à un engagement des deux partis, à une sorte de dispositif presque démocratique, ce qu'il n'est pas)
Je dirais même que, d'un point de vue (vraiment) pédagogique, c'est catastrophique, parce qu'il habitue l'élève à penser qu'on peut signer des contrats sans les avoir lus et que sa signature n'a aucune valeur.
Après, on s'étonne que tant de gens signent des chèques sans provision sans sourciller... ou signent des contrats d'assurance en croyant que bla, bla, bla mais en découvrant beaucoup plus tard que pas bla, bla, bla du tout.
Et arguent que...

Ben oui, j'lai bien signé, ce foutu contrat, mais j'l'avais pas lu ! Donc, je suis victime !

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Désastreux !



Titre III : Des contrats ou des obligations conventionnelles en général.

Article 1101
Le contrat est une convention par laquelle une ou plusieurs personnes s'obligent, envers une ou plusieurs autres, à donner, à faire ou à ne pas faire quelque chose.

Article 1103
Il est unilatéral lorsqu'une ou plusieurs personnes sont obligées envers une ou plusieurs autres, sans que de la part de ces dernières il y ait d'engagement.



Section 3 : De l'objet et de la matière des contrats.

Article 1128
Il n'y a que les choses qui sont dans le commerce qui puissent être l'objet des conventions.

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Hors Concours

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Super, merci beaucoup, c'est parfait. :)

J'ai une dernière petite demande: pour donner du crédit aux informations récoltées, je vais mentionner le fait que je me suis entretenu avec une... "spécialiste". Mais ce n'est pas terrible, dit comme ça. Pourrais-tu, s'il te plaît, me dire comment je peux te "qualifier"? Es-tu étudiante, enseignante en droit, avocate, juriste...?
Bien sûr, je ne donnerai aucune autre information qui permettrait de t'identifier.

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Je suis entièrement d'accord. J'avais décidé de ne pas signer le reglement interieur de ma fille car je n'étais pas d'accord sur certains points. Au final on nous remet un reglement interieur avec des obligations et interdictions... Qu'on soit d'accord ou pas c'est à prendre ou à laisser... Ma fille a reçu une croix rouge et une punition parce que la maitresse pensait qu'elle ne m'avait pas remis le document a signer... Quand jai expliqué à la directrice que je n'étais pas d'accord elle n'était pas d'humeur à écouter mes revendications, elle a tourné les talons et m'a dit faites ce que vous voulez.... Jai signé pour la lecture pas pour accord...comment fait on dans ce cas là? Un petit conseil m'aiderait beaucoup. Merci

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Bonjour,
Je repasse car je viens de recevoir un e-mail m'avertissant d'une réponse sur ce sujet... C'est assez amusant de retomber sur ce fil qui date d'il y a deux ans... Depuis j'ai terminé mon master, passé le CAPES et je suis dans ma première année d'exercice en tant qu'enseignant!

A vrai dire je ne sais plus trop comment s'est terminée cette histoire, sinon que sur d'autres forums, tout comme ici, les juristes qui ont accepté de me répondre ont trouvé que la signature du règlement posait effectivement problème. Et au final mon travail a été apprécié par mes profs de l'époque pour les questions qu'il posait.

Pour répondre à la dame ci-dessus, je suppose qu'en cas de désaccord ferme avec le règlement, il ne reste plus qu'à scolariser l'enfant ailleurs? Mais est-ce seulement possible, avec la carte scolaire...?
Le règlement peut être modifié au Conseil d'administration par les élus (qui incluent des élèves et des parents d'élèves) mais tout parent/élève est malgré tout obligé d'accepter le règlement tel qu'il est en début d'année, je crois...?

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bonjour cette semaine j ai eu un problème avec un parent d'élève qui voulais désinscrire sont enfant d'une association et récupéré ces chèques nous lui avons dit clairement que ce n'étais pas possible car le reglement stipuler qu en cas de départ volontaire vous ne serais pas rembourser.

maintenant cette personne nous fait du tort en nous trainant dans la boue etc.....

que dois je faire ? en ne respectant pas notre reglement je craint que ce soit la porte ouverte à toutes sortes de revendications et par la même ne pas être juste vis à vis des autres.

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Bonjour,
C'est une association pour la défense de l'orthographe et le respect de la grammaire ?
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Bonsoir,
le monde n,est pas fait que de professeur chère monsieur :)

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Re,
Ben oui, mais il est question de parent d'élève, non ?
Plus, votre pseudo...

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Bonjour,

je vais bientôt être dans cette situation (signer un règlement intérieur) et il est sûr que la méthode n'est pas très démocratique parce qu'en réalité, on n'a pas vraiment le choix puisque c'est le collège du secteur. Changer de collège ne changera pas grand chose puisque les règlements intérieurs se valent.
D'un autre côté, je peux comprendre. On ne peut pas faire fonctionner un collège autrement qu'avec des règles strictes pour protéger et donner un enseignement de qualité aux élèves. Et puis, il ne faut pas exagérer, les punitions ne sont plus ce qu'elles étaient... Alors on signe sans faire d'histoire ...