Conflit de loi dans le temps (contrat)

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Bonjour,

J'ai un cas pratique à faire et je me heurte à un problème en raison de quelque chose que je ne saisis pas. L'énoncé de mon cas pratique porte sur un contrat conclut entre deux entreprises A et B (A s'engageant à assurer l'entretien de B). Or, une brutale augmentation des matières premières fait que l'entreprise A connaît des difficultés financières pour assurer l'entretien de B. Ainsi, elle voudrait savoir si elle peut bénéficier d'une loi nouvelle (promulguée plusieurs années après la conclusion du contrat) pour éviter de perdre bcp d'argent.

Mon travail :

- en situation contractuelle : principe de survie de la loi ancienne.
Or, ici la loi nouvelle (nouvel article du code civil) prévoit des dispositions transitoires. Ainsi, normalement la loi est directement rétroactive je pense (car exception) et logiquement l'entreprise B peut en bénéficier.

En fait je m'interroge parce que pour les contrats en principe on a une survie de la loi ancienne, hormis pour un intérêt public (ce qui n'est pas le cas ici). Mais comme la loi nouvelle prévoit des dispositions transitoires, nous ne sommes pas dans quelque chose de rétroactif ?

Publié par
Isidore Beautrelet Administrateur

Bonjour

Afin de mieux vous aider, il faut nous retranscrire l'énoncé de votre cas pratique.
En effet dans votre développement vous parlez de dispositions transitoires alors que dans votre résumé des faits cela n'apparait pas.


Sinon, effectivement une loi nouvelle n'affecte pas en principe les effets futurs des contrats qui ont été conclus avant son entrée en vigueur car il y a survie de la loi ancienne en vertu de l'intangibilité des conventions.
Toutefois il y a deux exceptions où la loi nouvelle pourra s'appliquer aux effets futurs :

- Le législateur l'a expressément prévu

- La loi nouvelle est d'ordre public (précision du législateur ou appréciation souveraine du juge).

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Merci de votre réponse rapide! voici l'énoncé :

Un contrat de maintenance est conclu le 5 juin 2000, entre l'entreprise A et l'entreprise B. L'entreprise A s'engage à vérifier une fois par trimestre que le système de climatisation de l'entreprise B fonctionne normalement et, si ce n'est le cas, de procéder à des travaux. Ainsi, l'entreprise B paye 5000€/an, quelque soit le montant des travaux nécessaires.
Le mois dernier, l'entreprise A a constaté la nécessité de réaliser d'importants travaux de réparations. Or, la récente augmentation du coût des matières premières fait que le coût des travaux s'élèverait à plus de 25 000€. L'entreprise A s'exposerait alors à une importante perte d'argent si elle effectuait les réparations. L'entreprise A voudrait bénéficier de l'article 1195 du code civil, introduit récemment par une réforme des contrats. L'entreprise A peut-elle bénéficier de l'article ?

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Art. 1195 : Si un changement de circonstances imprévisible lors de la conclusion du contrat rend l'exécution excessivement onéreuse pour une partie qui n'avait pas accepté d'en assumer le risque, celle-ci peut demander une renégociation du contrat à son cocontractant. Elle continue à exécuter ses obligations durant la renégociation.

En cas de refus ou d'échec de la renégociation, les parties peuvent convenir de la résolution du contrat, à la date et aux conditions qu'elles déterminent, ou demander d'un commun accord au juge de procéder à son adaptation. A défaut d'accord dans un délai raisonnable, le juge peut, à la demande d'une partie, réviser le contrat ou y mettre fin, à la date et aux conditions qu'il fixe. — Dispositions transitoires

Publié par
Isidore Beautrelet Administrateur

Alors effectivement il est fait référence à l'article 1195 dans sa version issue de l'Ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations.

Il s'agit de savoir si cette disposition à vocation à régir les relations futures des contrats qui ont été conclus avant son entrée en vigueur.

L'article 9 de cette même Ordonnance précise Les dispositions de la présente ordonnance entreront en vigueur le 1er octobre 2016.
Les contrats conclus avant cette date demeurent soumis à la loi ancienne.
Toutefois, les dispositions des troisième et quatrième alinéas de l'article 1123 et celles des articles 1158 et 1183 sont applicables dès l'entrée en vigueur de la présente ordonnance.

Lorsqu'une instance a été introduite avant l'entrée en vigueur de la présente ordonnance, l'action est poursuivie et jugée conformément à la loi ancienne. Cette loi s'applique également en appel et en cassation.


On relève que l'article 1195 ne fait pas partie des dispositions immédiatement applicable.
Par conséquent, on devrait appliquer le principe de survie de la loi ancienne.

Les praticiens et la doctrine sont divisés sur le fait de savoir si cette disposition est d'ordre public.

- D'un côté, il y a ceux qui soutienne il ne résulte pas de ce qu’une partie peut « accepter le risque d’un coût excessivement onéreux » que ce texte est supplétif. Un texte supplétif est un texte que les parties peuvent éliminer discrétionnairement, purement et simplement. Or accepter un risque postule en lui-même deux conditions : 1) que l'acceptation soit libre et non équivoque ; 2) que le risque accepté soit déterminé de façon précise et circonstanciée [...] En conséquence, une partie ne saurait renoncer par avance au droit d'invoquer l'imprévision, ce qui n'interdit pas un aménagement de ce droit pourvu qu'il ne vide pas de sa substance le droit d'invoquer l'imprévision
https://www.efl.fr/droit/affaires/details.html?ref=ui-c328e6cd-fed8-4761-9722-b8e1f7182aa3

- De l'autre, il y a ceux qui relèvent que le rapport de la Chancellerie signale explicitement que la rédaction de l’article 1195 implique que le texte revêt un caractère supplétif, et que les parties peuvent convenir à l’avance de l’écarter pour choisir de supporter les conséquences de la survenance de telles circonstances, qui viendraient bouleverser l’économie du contrat. Sur ce dernier point, il est vrai que l’article conditionne sa mobilisation au fait que la partie victime de l’imprévision n’ait pas accepté d’assumer le risque d’un changement imprévisible de circonstances. Dés lors, il semble possible pour les parties d’inclure une clause « d’acceptation du risque d’imprévision » afin d’écarter purement et simplement l’application de l’article 1195 du Code civil. Cette clause doit être rédigée, à notre sens, de manière non équivoque
https://www.village-justice.com/articles/Theorie-imprevision-reception-par-Code-civil-son-incidence-matiere-ingenierie,24463.html

Dans le cadre d'un litige, il reviendra au juge en vertu de son pouvoir d'appréciation, de se prononcer sur le caractère d'ordre public ou non de cet article.


Voilà vous avez toutes les informations pour résoudre ce cas pratique. Il ne vous reste plus qu'à réorganiser tout cela sous forme d'un syllogisme et d'essayer de prendre partie pour l'une des deux interprétations de l'article 1195 du Code civil tout en précisant que le juge face au silence des textes pourra se prononcer sur le caractère d'ordre public ou non


N'hésitez pas à revenir si vous avez des questions.

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