Problème de qualification en droit pénal spécial

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Bonjour,

Je suis étudiante en L3, je rencontre des difficultés avec un cas pratique.

Un homme se dispute avec sa femme, il menace de la frapper avec des objets. Pour se calmer il va boire un verre. Lorsqu'il rentre chez lui sa femme s'enferme dans la chambre et s'adosse contre la porte. Sous l'emprise de l'alcool il récupère une hache incendie dans le hall de l'immeuble quand il rentre et frappe la porte de la chambre. La hache atteint le dos de sa femme, elle décède.

Le cas relève-t-il de l'homicide volontaire ou involontaire? Après plusieurs jours de recherche impossible de trouver des faits similaires dans la JP ou du moins "un coup meurtrier porté sans voir la personne".

Auriez-vous une idée? Je vous remercie. Dernière modification : 07/10/2019 - par Isidore Beautrelet

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MorganM Intervenant

Bonjour,

Quelques pistes de réflexion.

L'homicide volontaire suppose un dol spécial "animus necandi", autrement dit l'intention de tuer qui doit donc être caractérisée.

L'intention de tuer est parfois difficile à prouver. Par conséquent la jurisprudence considère par exemple qu'elle peut se déduire de la localisation sur le corps de la victime du coup porté (partie vitale atteinte ou non?).



Dans votre cas pratique, vous devez vous interroger quels sont les éléments susceptibles de démontrer cet animus necandi. Avait-il la volonté de tuer sa femme lorsqu'il a donné son coup de hache? Si la réponse à cette question n'est pas tranchée, alors il faut regarder d'autres éléments de fait.

C'est à ce moment là que vous pouvez vous servir de la jurisprudence sur l'animus necandi. Soit vous considérez que l'arme utilisée (une hache) + la force employée (le fait que la hache ait traversé la porte) sont autant d'éléments permettant d'en déduire que l'auteur ne pouvait pas raisonnablement penser que son coup ne serait pas meurtrier, s'il avait connaissance que la victime était adossée derrière la porte. A l'inverse, s'il ne savait pas que la victime était derrière la porte, alors cette position pourrait être plus discutable.

Ne cherchez pas le cas identique en jurisprudence (j'ignore si cette question précise a été posée à la Cour de cassation) car le plus intéressant est votre raisonnement (et non pas le simple copié collé de la solution dela Cour de cassation).

Analysez plutôt les arrêts de la Cour sur l'animus necandi afin de parfaire et appuyer votre raisonnement juridique. Il s'agit de savoir ce que la Cour de cassation considère comme démontrant l'animus necandi ou non (comme dit précédemment : la localisation/force du coup porté, étant précisé que certaines limites sont posées : la Cour considère notamment que le fait de frapper plusieurs fois la tête de la victime contre le sol ne caractérise pas nécessairement l'animus necandi...).

Dans un second temps, une fois l'infraction caractérisée, n'oubliez pas de vousinterroger sur l'état alcoolique de l'intéressé qui fait l'objet d'un point précis en jurisprudence.

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Merci pour la réponse MORGANM.



Dans ce cas pratique, trois informations me sautent aux yeux.

La première, est que l'agresseur, est sortit, a bu, puis est revenu sous l'emprise de l'alcool (ce qui constitue un facteur de perte de contrôle sur soit).

Deuxièmement, il ne pouvait pas voir où se situe sa femme, étant donné que la porte était fermé, la force du coup de ce fait, ne peut pas indiquer une intention de tuer sans par ailleurs spéculer sur cette alternative. Ici, il serait plutôt signe d'un désir hargneux d'entrer, le fait de tuer reste une spéculation.

Troisièmement, il est indiqué qu'il menace de la frapper, le fait est grave sans aucun doute, mais il n'est pas stipulé qu'il menace de la tuer au moment X.

Ces indices réunis, il me semble que le cas se dirige vers un homicide involontaire.

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"On est le fruit de son histoire" Maître Eric Dupond-Moretti