Les cas de divorce en droit français

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A titre liminaire, nous vous rappelons que cette fiche n'engage en rien l'association Juristudiant quant aux affirmations inclues ci-après et que pour toute application à  votre problème personnel, nous ne pouvons que vous conseiller d'aller voir un avocat spécialiste de la matière ou un notaire.

Pour toute erreur relevée dans ce document, nous vous serions reconnaissants de nous en informer en le signalant soit par mail (en utilisant la page [contact-> http://site.juristudiant.com/association.html]), soit directement sur le [forum Juristudiant-> http://forum.juristudiant.com/index.php] .


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Fiche mémo sur les cas de divorce


{{ {Bref historique :} }}

{{Droit romain}} : admet largement le divorce, y compris à  l'initiative du père. Des causes légitimes de divorce sont créées : femme adultère, entremetteuse, empoisonneuse, homme homicide, violeur de sépulture, faute...

{{Haut Moyen-à‚ge}} : les Germains autorisent le divorce par consentement mutuel, les Francs n'acceptent le divorce que dans des cas déterminés (femme adultère).

{{Moyen-à‚ge}} : indissolubilité du mariage ; il ne peut y avoir qu'annulation pour défaut de consommation, ou séparation de corps, d'habitation ou de biens laissant subsister le lien matrimonial.

{{Ancien régime}} : indissolubilité du mariage.

{{1792}} : introduction du divorce

{{Cciv 1804}} : maintien du divorce

{{Loi du 8 mai 1816}} : suppression du divorce (motifs religieux)

{{Loi du 27 juillet 1884}} : rétablissement du divorce pour faute seulement (motifs politiques)

{{Loi du 2 avril 1941}} : restreint le divorce en empêchant sa demande durant les trois premières années du mariage ; la conversion de la séparation de corps en divorce après trois années de mariage est de droit pour l'époux au profit duquel a été prononcée cette séparation

{{Ordonnance du 12 avril 1945}} : suppression du délai de trois années ; chacun peut demander la conversion de la séparation de corps en divorce

{{Loi du 11 juillet 1975}} portant réforme du divorce, entrée en vigueur le 1er janv. 1976 : ouverture à  d'autres cas de divorce que la faute. Dédramatisation du divorce, création d'une prestation compensatoire forfaitaire au lieu d'une pension alimentaire pour l'époux divorcé

{{Loi du 8 janvier 1993}} : création du JAF

Proposition de loi votée par l'AN le 10 oct. 2001 supprimant 3 cas de divorce au profit d'un divorce pour rupture irrémédiable du lien conjugal. Refus du Sénat de voter cette proposition

Une nouvelle réforme est pour certains nécessaire : multiplication des divorces pour faute, diminution des divorces par consentement mutuel, longueur des procédures (neuf mois à  un an et demi), conflits, prestation compensatoire trop stricte...

{{Loi du 26 mai 2004}} : procédures raccourcies, faveur envers les accords entre époux, simplification du régime de la prestation compensatoire

Des discussions se forment sur la nécessité de confier le prononcé du divorce par consentement mutuel au notaire (Rapport Dekeuwer-Desfossez)

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{{1° Le divorce par consentement mutuel}}

{Ancien « divorce sur requête conjointe » qui ne pouvait être mis en Å“uvre qu'après six mois de vie commune ( visant les mariages blancs ). Pas de véritable changement de fond par rapport à  l'ancienne loi, mais allègement de la procédure par suppressions des délais.}

Seul divorce non contentieux, favorisé par le législateur.


Particularité : les époux sont {{d'accord}} sur le {{principe}} du divorce (dissolution du lien matrimonial) ET sur les {{conséquences}} de cette dissolution.

→ un seul avocat peut être choisi pour les deux époux


{{ {Conditions} }}

articles 250 à  250-3 du Code civil et 1088 à  1105 du Code de procédure civile





{ {{Procédure}} } :






- requête unique sans indication des motifs du divorce, présentée par un avocat commun ou deux avocats, signée et datée, 250 Cciv

-- mention des noms, prénoms, profession, date et lieu de naissance, mariage, enfants, résidence, assurance maladie, allocations familiales, avocats

- accompagnée d'une convention en annexe portant règlement complet des effets du divorce + état liquidatif du régime matrimonial (acte authentique si biens soumis à  publicité foncière), datée et signée

268 Cciv : les époux peuvent révoquer ou maintenir les donations et avantages matrimoniaux ; à  défaut de précisions, ils sont réputés avoir maintenus les avantages

262-1 Cciv : ils peuvent également fixer la date des effets du divorce quant à  leurs biens (pour la liquidation du régime matrimonial)

Chacun récupère l'usage de son {nom}, sauf accord du conjoint ou autorisation du juge.

Liberté de fixer le {montant} de la prestation compensatoire dans la convention, 278 Cciv (refus judiciaire possible en cas d'inéquité)


- convocation des époux au greffe par lettre simple 15 jours avant : chacun est entendu séparément puis ensemble

Le juge apporte conseils et avertissements, vérifie la recevabilité de la demande. Il contrôle le { {{consentement}} } des époux par un entretien, il vérifie qu'il est {réel, libre et éclairé} ( y compris par des expertises ), et que les{ intérêts des enfants et de l'un des époux} sont suffisamment préservés. Il examine la convention temporaire et peut demander des modifications ou suppressions. Il ne contrôle en revanche pas les motifs.

→ contrôle de la persistance du consentement (la volonté de divorcer a un caractère d'ordre public) et du sérieux de la convention (équilibre des prestations)


- homologation de la convention par ordonnance et prononcé du divorce OU ajournement de la décision jusqu'à  modification de la convention dans les six mois. Deux ajournements ne sont pas possibles -> caducité de la demande.

La convention homologuée est intangible et ne peut plus être modifiée, sauf nouvel accord des époux homologué / recours en révision / recours en rectification d'une erreur matérielle / recours en révision de la prestation compensatoire.


=> appel dans les 15 jours de la décision ou de l'ordonnance de refus d'homologation
=> pourvoi en cassation dans les 15 jours de la décision d'homologation ( pas d'effet suspensif pour les décisions concernant les enfants )
=> tierce opposition aux créanciers dans le délai d'un an







{{2° le divorce par acceptation du principe de la rupture du mariage ou divorce accepté}}


{Autrefois « divorce sur double aveu » ou « sur demande acceptée », il constituait une forme de divorce par consentement mutuel imparfait puisque le consentement n'était pas simultané. Il ne pouvait intervenir qu'après six mois de vie commune. 12% des divorces en France à  l'époque.

L'un des époux devait établir un mémoire présentant objectivement des faits rendant intolérables le maintien de la vie commune, sans les imputer à  l'un ou l'autre des époux. Ce mémoire, signé, était communiqué par LRAR à  l'autre époux.
L'autre époux devait alors accepter le mémoire en reconnaissant les faits ( à  défaut, la procédure était caduque ) et écrivait à  son tour un mémoire reconnaissant les faits -> double aveu. Le mémoire de réponse n'était pas obligatoire, une simple déclaration officielle d'acceptation déposée par l'avocat suffisait.}

Article 233 Cciv

Divorce contentieux


{{Conditions}}




- dépôt de la requête initiale
Précède la demande en divorce proprement dite, sans donner les motifs du divorce, 1106 CPC. Contient les demandes relatives aux mesures provisoires et les mesures urgentes (enfants, domicile...)

- convocation des époux à  l'audience de conciliation, 252 Cciv
En personne. Les enfants en à¢ge de discernement peuvent demander à  être entendus par le juge, 288-1 Cciv

→ débat sur le principe de la rupture et l'orientation de la procédure de divorce, explications des avocats et du juge

Si seul l'époux demandeur se présente, il n'y a pas acceptation du principe de la rupture du mariage, et seuls les motifs évoqués dans la requête pourront être utilisés

En cas d'accord, un procès-verbal d'acceptation du principe de la rupture du mariage est signé et annexé à  l'ordonnance de non conciliation, précisant le caractère non rétractable de l'acceptation

- instance de divorce

L'acceptation peut se faire à  tout moment entre la conciliation et l'instance







{{3° le divorce pour altération définitive du lien conjugal}}

{Ancien « divorce pour rupture de la vie commune ».

Autrefois critiqué comme une répudiation par certains, il s'agissait de la régularisation d'une séparation durable. Deux causes étaient envisagées :
la rupture pour altération grave ( 6 ans ) des facultés mentales d'un époux, malgré le devoir d'assistance. à‰taient exclues les altérations physiques. L'altération devait être telle qu'elle avait entraîné la rupture de la communauté de vie, mais les six années concernaient l'altération psychique.
la séparation de fait de plus de 6 ans : les époux ne vivaient plus sous le même toit, il ne fallait pas seulement une absence d'intimité. La séparation était de fait ou organisée judiciairement. Elle devait avoir duré six ans au moins, sans suspension et sans réconciliation.

Le demandeur devait assumer toutes les charges du divorce, à  commencer par le maintien du devoir de secours ( pension alimentaire ou versement d'un capital ) jusqu'au remariage de l'autre ; le défendeur pouvait continuer à  porter le nom de l'époux. Ce qui explique que ce divorce n'était demandé que dans 1,5% des cas.}

Divorce contentieux

237 Cciv



{{Conditions}}




{{Procédure}}

- requête en divorce par avocat, sans précision des motifs, faits ou fondements juridiques, 251 Cciv + éventuelles demande de mesures provisoires avec exposé sommaire des motifs ( résidence séparée avec enfants mineurs ou sauvegarde de 220-1 Cciv )

- tentative de conciliation des époux, 252 Cciv – entretien avec le juge, fixation des mesures provisoires

- convocation au greffe dans les 15 jours au moins par LRAR, ou assignation à  jour fixe. L'époux défendeur doit se présenter en personne

- entretien personnel puis commun avec les époux sur le principe de la rupture et ses conséquences

SI maintien de la demande : ordonnance renvoyant les parties à  une nouvelle tentative de conciliation OU ONC autorisant à  introduire l'instance en divorce

- instance : choix du cas de divorce - demande en divorce sur consentement mutuel, demande en divorce sur acceptation du principe de la rupture, à  tout moment







{{4° le divorce pour faute}}

{Entre 1804 et 1975, c'était la seule cause de divorce. Elle était prévue pour adultère, condamnation, excès, sévices et injures. Supprimée en 1816, elle réapparait en 1941 sous les traits d'une violation grave et renouvelée des devoirs et obligations résultant du mariage rendant intolérable le maintien du lien conjugal.}

Divorce contentieux

242 Cciv

{{Conditions}}




{{ {La violation grave OU répétée des devoirs et obligations du mariage} }}

On considère que le caractère de renouvellement de la faute est compris dans la gravité : il s'agit d'un fait répétitif ou grave, permanent, ou d'une succession de faits s'accumulant.
« le caractère de gravité et celui de répétition sont alternatifs aux termes de la loi », Cass. 2e civ., 8 juill. 1999, no 97-14.138

Le juge apprécie souverainement la gravité en tenant compte de l'éducation et du milieu des époux.

Le manquement aux devoirs et obligations du mariage peut consister dans le mépris des points suivants :






Il est toutefois possible de riposter et de mettre à  la charge de l'époux demandeur des torts, 245 Cciv :

- {{ {la demande reconventionnelle} }}

Le défendeur invoque lui aussi le divorce pour faute à  l'encontre du demandeur principal, laissant au juge deux demandes sur le même fondement : le juge décidera selon les faits de prononcer le divorce aux torts exclusifs de l'un, de l'autre, ou aux torts partagés.


- {{ {l'excuse} }}

« l'attitude de l'un des conjoints qui serait objectivement fautive, peut perdre ce caractère en raison du comportement de l'autre conjoint » : la faute du défendeur dépend de l'existence d'une faute commise par le demandeur.
Il s'agira d'une faute, antérieure à  celle du défendeur, présentant un lien de causalité, mais pas nécessairement de même nature du moment qu'elle n'est pas excessive. Donne lieu à  un divorce aux torts partagés.


- {{ {les moyens de défense} }}

Lorsque le juge se rend compte de l'existence de torts partagés, il peut prononcer un divorce aux torts partagés même s'il n'y a pas eu de demande reconventionnelle ou d'excuse




{{Procédure des divorces pour acceptation du principe de la rupture, pour altération définitive du lien conjugal et pour faute}}


{ {{1° phase de conciliation}} }

- requête en divorce par avocat, sans précision des motifs, faits ou fondements juridiques, 251 Cciv + éventuelles demande de mesures provisoires avec exposé sommaire des motifs ( résidence séparée avec enfants mineurs ou sauvegarde de 220-1 Cciv )

- tentative de conciliation : indication par le juge au bas de la requête de la date de conciliation.

- Convocation au greffe dans les 15 jours au moins par LRAR, ou assignation à  jour fixe. L'époux défendeur doit se présenter en personne et avec un avocat si divorce sur acceptation du principe de la rupture

-- les propos de la tentative de conciliation ne peuvent être invoqués dans la site de la procédure. Entretien personnel puis commun avec les époux sur le principe de la rupture et ses conséquences

SI maintien de la demande : ordonnance renvoyant les parties à  une nouvelle tentative de conciliation OU ONC autorisant à  introduire l'instance en divorce

mesures provisoires à  n'importe quel moment de la procédure, 254 à  257 Cciv : médiation familiale, modalités de la résidence séparée, attribution de la jouissance du logement et des biens communs, remise des objets personnels, fixation de la pension alimentaire, désignation d'un professionnel pour un inventaire ou d'un notaire pour liquidation, modalités de l'autorité parentale, mesures urgentes ( résidence séparée )... valables 30 mois



{{ {2° l'instance} }}

- l'assignation ou requête conjointe : dans un délai de six mois après l'ONC

- choix du cas de divorce – cas unique, pas de demandes subsidiaires. Une modification de la demande en divorce sur consentement mutuel peut intervenir à  tout moment, de même qu'une demande en divorce sur acceptation du principe de la rupture

- demande reconventionnelle de divorce sur consentement mutuel si accord, ou pour acceptation du principe de la rupture ( quand demande initiale = faute ou altération ), ou pour faute ( quand demande initiale = altération ). La réconciliation empêche de se prévaloir des faits allégués.
La demande reconventionnelle visait avant à  faire reconnaître un partage des torts.

Ordre d'examen des demandes, 246 Cciv :
altération / faute : examen de la faute en 1er -> torts exclusifs ou altération
autre / altération : altération quand la durée est remplie
séparation de corps / divorce : examen du divorce. Si les deux sont fondées sur la faute, divorce aux torts partagés.

- défense au fond : fins de non recevoir -> pour nullité du mariage, décès d'un des époux, absence de règlement des intérêts

-- preuve : preuve libre, par tous moyens -> lettres missives ( obtenues sans fraude, 259-1 Cciv ) , témoignage, constat d'huissier, présomptions, aveu... Une enquête sociale peut déterminer les modalités de l'exercice de l'autorité parentale. Les descendants ne peuvent jamais être entendus sur les griefs.

- le jugement :

-- rejet : le juge statue sur les modalités de l'exercice de l'autorité parentale, la contribution aux charges du mariage, la résidence

-- prononcé du divorce = constitutif. Dissolution. Publicité par mention en marge de l'acte de mariage et de naissance