L'application de la loi pénale dans le temps

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Article publié par Yann.

Cette fiche date de 1999 et nous a été donnée par le juripôle.


{{L'application de la loi pénale dans le temps}}


{{A-LA LOI PENALE DE FOND :}}

(JCP 1992 . I . N° 3615, étude de F. Desportes et F. le Gunehec : Etudie les grands points du Nouveau Code Pénal dont ici l'application de la loi pénale dans le temps, c'est un résumé très succinct, l'aide mémoire idéal quand on a déjà  appris son cours.)

Les lois pénales de fond sont celles qui définissent les comportements constituant des infractions punissables et précisent les conditions de ces comportements incriminés ainsi que les peines qui leur sont applicables.

{1-Problème : la survenance du comportement réprimé et le texte qui s'y applique}

L'infraction instantanée : le texte légal qui lui est applicable est celui du moment de la réalisation du comportement incriminé.

L'infraction d'habitude : le texte légal applicable est celui du moment du dernier acte de l'habitude (et ce même si au commencement de l'habitude une autre loi était en vigueur ).

L' infraction continue : si une nouvelle loi intervient et que la situation infractionnelle persiste, cette nouvelle loi lui sera applicable.


{2-Principe d'application de ces lois pénales de fond}


Elles s'appliquent aux faits intervenus après leur entrée en vigueur, il s'agit ici d'un principe de non-rétroactivité des lois pénales de fond. Art 8 DDHC 1789 : "... nul ne peut être puni qu'en vertu d'une loi établie et promulguée antérieurement au délit...", ce principe est rappelé dans l'article 112-1 al 1&2 NCP. Il existe cependant un aménagement à  ce principe, constitué tout d'abord en simple exception, il est devenu un principe constitutionnel à  part entière, corollaire au premier : il s'agit du principe de la rétroactivité "in mitius", quand la loi nouvelle est plus douce que la loi ancienne, elle s'applique rétroactivement aux faits incriminés à  conditions que ceux-ci n'aient pas déjà  été jugés définitivement. Justification : L'article 8 DDHC ne visait que les peines "strictement nécessaires", si une peine devient plus douce, c'est donc qu'il n'est plus nécessaire d'appliquer l'ancienne plus sévère, la peine plus douce est désormais suffisante, il paraît donc juste d'en faire bénéficier un maximum de personnes : art 112-1 al 3 NCP.

(Attention : il existe des lois plus sévères qui s'appliquent à  une situation antérieure, telles les lois expressément rétroactives, les lois interprétatives quine sont pas des lois pénales car elles ne font qu'expliquer une notion déjà  existante, ou les lois déclaratives qui ne sont pas nouvelles car elles ne font que rappeler des principes préexistant... alors, méfiance !!!).


{3-Problème : comment savoir si une loi pénale de fond est plus douce ou plus sévère ?}

( Bibl : doctrine ; D. Al. Bchéraoui : JCP 94. I. 3767 : " du caractère plus doux ou plus sévère de certaines dispositions du nouveau code pénal.")

a)- Au niveau des lois d'incrimination (définition des comportements punissables) :

Plus douces :
- Définition restrictive des éléments constitutifs de l'infraction (un comportement seulement apparenté mais ne remplissant pas exactement la définition ne sera pas poursuivi). Retient un fait justificatif nouveau (ex : retient un nouveau cas de légitime défense).
- Suppression de l'infraction : art 112-4 al 2 NCP.
- Suppression d'une circonstance aggravante : ( ex : un délit avec une circonstance aggravante devient un délit simple).
- Un crime devient un délit (correctionnalisation légale ).
- Un crime ou un délit deviennent une contravention (contraventionnalisation légale).

Plus sévère :
- Création d'une nouvelle infraction.
- Suppression d'un élément constitutif de l'infraction (imaginons qu'un comportement soit incriminé s'il remplit trois conditions, une loi nouvelle intervient et supprime une de ces conditions, le comportement est donc incriminé dès qu'il remplit les deux conditions restantes, ce qui est plus facile ).
- Création d'une nouvelle circonstance aggravante (ce qui était jusque là  une infraction simple devient une infraction aggravée).

b)Au niveau des lois de pénalité (qui concernent le montant et l'application de la peine en elle-même ) :

Plus douces :
- Réduction du montant de la peine.

Plus sévères :
- Création d'une sanction nouvelle.
- Augmentation du maximum encouru. ( Attention : cette liste n'est pas exhaustive !)


{4-Problème : comment savoir si une loi nouvelle est plus douce ou plus sévère quand elle contient plusieurs dispositions ?}


Il s'agit ici du problème des lois simples et des lois complexes :

Les lois simples ne contiennent qu'une seule disposition, il est donc aisé de savoir si elle aggrave ou améliore la situation du délinquant.

Les lois complexes comprennent elles plusieurs dispositions de nature à  changer le traitement du délinquant. Le problème se pose quand ces dispositions sont à  la fois plus douces et plus sévères par rapport au régime antérieurement applicable :

Nous nous trouvons alors face à  deux situations :

- Les différentes dispositions sont divisibles entre elles, il en est alors fait une application distributive suivant que la disposition " divisée " est plus douce ou plus sévère.

- Les différentes dispositions sont indivisibles les unes des autres, il faut donc les appliquer dans leur ensemble ; deux théories s'affrontent pour savoir si la loi dans son ensemble est plus sévère ou plus douce :

Théorie de la prédominance de la disposition principale (technique retenue par la JP )

Théorie de l'appréciation globale (développée uniquement en doctrine )


{5-Conséquences pratiques}


Quand une loi nouvelle plus douce intervient alors que la procédure est en cours, si des jugements au fond sont déjà  intervenus mais qu'ils ne sont pas définitifs, les solutions sont annulées et l'affaire est renvoyée devant la même juridiction autrement composée. Il ne s'agit pas ici d'une procédure d'appel, la même juridiction est compétente car, lors du premier jugement, elle a délibéré conformément aux lois alors en vigueur, elle n'est nullement en cause.

(Cass Crim 09/03/1994 BC n° 93 p 203. " Si, en l' état d' une accusation de complicité de meurtre, et en raison de l' irrévocabilité des réponses de la Cour et du jury à  la question de culpabilité de l' accusé ainsi que leur refus, à  la majorité de 8 voix au moins, de lui accorder les circonstances atténuantes, seule pouvait être prononcée par application des textes alors applicables, la peine légalement encourue de la réclusion criminelle à  perpétuité, la Cour de Cassation, faisant application de l' article L 131-5 du code de l' organisation judiciaire, est en mesure de lui substituer la peine maximale, plus douce, de 30 ans de réclusion criminelle, prévue depuis le premier mars 1994, par l' article 211-1 du code pénal.

Cass crim 06/04/1994 BC n) 137 p 304. " En l' état d' une accusation d' arrestation et séquestration arbitraires de personnes avec circonstances aggravante de menaces de mort conférant aux faits une qualification criminelle selon l' article 344 du Code Pénal alors applicable, mais en raison de la suppression de cette circonstance par la loi nouvelle plus douce, d' application immédiate, doit être annulé l' arrêt de la cour d' assises prononçant une peine de réclusion criminelle, alors légalement encourue, et l' affaire renvoyée, en raison de sa pleinitude de juridiction, devant la même cour d' assises autrement composée.

Cass Crim 07/04/1994 BC n° 141 p 310.

Le 07 avril 1993, la cour d'Appel de Limoges a condamné un homme à  une peine d'emprisonnement pour unecontravention de coups et violence, avant que ce jugement ne soit devenu définitif, la loi a changé et l'emprisonnement contraventionnel a disparu. Un pourvoi a donc été formé ; la Cour de Cassation souligne que l' arrêt de la cour d' appel n' encourt pas la censure pour avoir statué comme elle l' a fait, conformément aux lois alors en vigueur et elle renvoie l' affaire devant la même cour d' appel deLimoges, mais autrement composée.)


{{B-LES LOIS PENALES DE FORME ET LEUR APPLICATION DANS LE TEMPS}}

(JCP 1992. I. N° 3615, étude de F. Desportes et F. le Gunehec. Etudie les grands points du nouveau code pénal dont ici l'application de la loi pénale dans le temps, c' est un résumé très succinct, l'aide mémoire parfait quand on a déjà  appris son cours.)

Les lois pénales de forme sont celles qui définissent le déroulement de la procédure, avec la compétence des juridictions, les voies de recours, les délais, la prescription...

{1-Le principe}


Pour les lois pénales de forme, il y à  application immédiate de la loi nouvelle. (Article 112-2 al 1 NCP.)

{2-L'aménagement}


Tout comme pour les lois pénales de fond, le principe d'application immédiate des lois pénales de forme souffre quelques aménagements, ceux-ci vont dans le sens de la cohérence de la procédure et du traitement légalement le plus juste pour le délinquant.

a)Loi de compétence et d'organisation

Aménagement du principe : si un jugement au fond a déjà  été rendu lors de la survenance de la loi nouvelle, la procédure ultérieure obéît à  la loi antérieure, ce dans un but de cohérence de l'ensemble de l'affaire : art 112-2. 1°) NCO.

Loi sur les voies de recours : les recours obéissent aux lois en vigueur au jour o๠ils sont formés. Une loi postérieure modifiant leur forme n'aura aucun effet sur les recours déjà  formés. L'application immédiate se restreint ici aux recours entamés postérieurement à  la promulgation de la loi : art 112-3 NCP.

b)Loi sur les prescriptions :

La survenance de la loi nouvelle n'aura aucune incidence sur les prescriptions déjà  acquises (art 112-4 al 1 NCP). Le seul problème est celui des prescriptions en cours, l'ancien code pénal distinguait suivant qu'il s'agissait de la prescription de l'action ou de la peine. Le nouveau code pénal unifie le système et limite le principe de l'application immédiate au cas o๠la loi nouvelle n'a pas pour effet de rallonger des délais de prescription déjà  en cours au moment de la survenance de la loi nouvelle : art 112-2. 4°) NCP.