IEJ Paris XI 2006, procédure administrative contentieuse

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Dans le cadre du programme de contentieux administratif, vous commenterez l'arrêt suivant, en vous centrant sur la question de " l'office " du juge de l'excès de pouvoir.

CAA Bordeaux, 25 janvier 2005, Boulay, n°01BX01026

Vu la requête, enregistrée le 17 avril 2001 au greffe de la cour, présentée par M. Bertrand Boulay demeurant... ; M. Boulay demande à  la cour
1°) d'annuler le jugement n°9800303 du 13 février 2001 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté la demande d'annulation de la décision du directeur départemental de l'agriculture et de la forêt du Gers en date du 4 aoà»t 1997 refusant de lui attribuer l'indemnité compensatoire des handicaps naturels ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;
Vu les autres pièces du dissuer ;
Vu le code rural ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et le code de justice adminsitrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Sur la recevabilité :
Considérant que, dans sa requête introductive d'instance, M. Boulay a exposé qu'il demandait le bénéfice de l'aide juridictionnelle afin de faire appel du jugement n°980303-1 du 13 février 2001 du tribunal administratif de Pau, dont il a joint une copie ; qu'il a assorti cette requête de moyens tirés de l'absence de bien-fondé des motifs retenus par ls premiers juges ; qu'il doit être regardé comme ayant entendu demander l'annulation du jugement, ainsi que l'annulation de la décision qu'il contestait en première instance ; que cette requête, qui contient l'exposé de motifs de droit, satisfait aux dispositions de l'article R411-1 du code de justice administrative ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales n'est pas fondée et doit être écartée ;

Sur le fond :
Considérant que l'administration peut, en dernière instance cmme en appel, faire valoir devant le juge de l'exès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de drit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à  la date de cette décision ; qu'il appartient alors au juge, après avoir mis à  même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à  fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait prix la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif ; que dans l'affirmative il peut procéder à  la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué ;

Considérant qu'aux termes de l'article R.113-22 du code rural dans sa rédaction applicable à  l'espèce : " Peut bénéficier de l'indemnité compensatoire... tout agriculteur répondant aux conditions des 3°, 5°, 6° et 7° de l'article R.113-20, du 3° de l'article R.113-21 et, en outre, aux conditions suivantes : 1° Résider de façon permanente en zone défavorisée ; 2° Être chef d'une exploitation agricle ayant son siège et au moins 8° p. 10 de sa superficie agricole utile, représentant au moins trois hectares de superficie agricole, en zone défavorisée ; 3° Si [ l'agriculteur ] appuie sa demande sur une production animale, s'engager à  tenir, pendant la saison d'hiver (...) un effectif évalué en unités de gros bétail au moins égal à  celui déclaré et au minimum de trois unités de gros bétail. S'il appuie sa demande sur une production végétale, exploiter au moins 1 hectare de cultures primables dans les territoires de communes ou parties de communes de la zone de montagne classées en zone sèche (...) ; 5° Ne ps être à¢gé de plus de soixante-cinq ans ou ne pas avoir fait valoir ses droits à  (...) pension de retraite ; 6° S'engager ç poursuivre l'activité agricole dans la zone de montagne pendant cinq ans au moins (...) ; 7° Se conformer, pour le cheptel, aux prescriptions sanitaires qui pourront lui être imposées par les pouvoirs publics : que la condition prévue au 3° de l'article R.114-21 de ce code consiste à  Exercer... la profession agricole à  titre principal, c'est-à -dire consacrer à  l'exploitation (...) au moins 50 p. 100 de son temps actif et en retirer au moins 50 p. 100 de son revenu de travail ;

Considérant que, par la décision contestée du 4 aoà»t 1997, le directeur départemental de l'agriculture et de la forêt du Gers a rejeté la demande d'indemnité compensatoire des handicaps naturels présentée en qualité d'éleveur par M. Boulay au motif que celui-ci ne bénéficiait pas au 1er janvier 1997 des prestations de l'assurance maladie des exploitants agricoles ; que, M. Boulay ayant établi devant le tribunal adminsitratif l'inexactitude matérielle de ce motif, l'administration a fait valoir que la décision était légalement justifiée par le motif tiré de ce que l'intéressé avait cessé son activité agricle et ne pouvait plus, par suite, être regardé cmme cef d'une xploitation agricole auant son siège et au moins 80 p. 100 de sa superficie agricole utile, représentant au moins trois hectares de superficie agricole, en zone défavorisée ; que, par le jugement attaqué du 13 février 2001, le tribunal administratif de Pau, après avoir mis M. Boulay à  même de présenter ses observations sur ce point, a procédé à  la substitution de motifs ainsi sollicitée ;

Considérant qu'en appel, M. Boulay soutient qu'il n'a jamais cessé son exploitation depuis 1990 et produit notamment, à  l'appui de ses écritures, d'une part, des tableaux d'amortissements afférents à  l'année 2001 sur lesquels figurent en particulier des terrains, un tracteur agricole, un distributeur d'engrais, une bétaillère et des matériels de bureaux acquis ou mis en service antérieurement au 1er janvier 1997 et, d'autre part, un extrait du livre des bovins du département du Gers de l'année 2002, indiquant, pour ce qui le concerne, la détention de dix-neufs bovins nés dans son exploitation antérieurement au 1er janvier 1997 ou acquis par lui avant cette date ; que, dans ces conditions, ls seules circonstances dont se prévaut l'administration que des terres appartenant à  l'intéressé ont fait l'objet d'un jugement d'adjudication le 21 février 1996 et que la mutualité sociale agricole du Gers a indiqué dans un courrier adressé à  la direction départementale de l'agriculture et de la forêt du Gers que l'intéressé avait signalé que son cheptel avait été saisi le 11 juin 1996, ne sauraient suffire à  faire regarder M. Boulay comme ayant cessé toute activité agricole à  la date de la décision attaquée ; qu'ainsi, le motif substitué par les premiers juges à  celui qui fondait initialement la décision contestée, est lui-même entaché d'inexactitude matérielle et n'est donc pas de nature à  justifier légalement ladite décision ; que, par suite, sans qu'il y ait lieu de prescrire l'enquête sollicitée sur le fondement de l'article L 623-1 du code de justice administrative, le requérant est fondé à  soutenir que c'est à  tort que le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à  l'annulation de la décision du 4 aoà»t 1997 ;

Sur les conslusions à  fin d'injonction :
Considérant que l'annulation pour excès de pouvoir, par le présent arrêt, de la décision du 4 aoà»t 1997, rejetant la demande d'indemnité compensatoire des handicaps naturels permanents présentée par M. Boulay, si elle impose à  l'administration de procéder à  un nouvel examen de la demande, n'implique pas nécessairement le versement de cette indemnité ; que, par suite, les conclusions tendant à  ce qu'il soit ordonné à  l'administration de procéder à  ce versement ne sauraient être accueillies ;

DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Pau en date du 13 février 2001 est annulé.
Article 2 : La décision du directeur départemental de l'agriculture et de la forêt du Gers du 4 aoà»t 1997 est annulée.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejetée.