Dissert : La rapporteur public face à l’exigence du procès

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Bonjour,
voilà je suis en pleine révision du contentieux administratif, j'ai trouvé un sujet de dissertation : La Rapporteur public face à l’exigence du procès équitable.

J'ai fait un plan très détaillé, mais je voudrais savoir si je suis bien dans le sujet et dans la méthodologie.
Est ce que je peux poster ce que j'ai fait pour que vous me fassiez part de vos remarques? Sachant, que c'est juste pour mes révisions et non pas un exercice à rendre!

Merci!

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Yann Modérateur

Pas de problème.

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Ok merci!
C'est donc un plan assez détaillé : La Rapporteur public face à l’exigence du procès équitable :

Introduction :
Historique du RP. Article L.8 CJA : rôle du RP
Article 6§1 CESDH : “Tout personne à droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement, dans un délai raisonnable et devant un tribunal impartial et indépendant, établit par la loi […], dans les domaines portant sur les droits et obligations à caractère civil, et pénal.”
Définition de l'impartialité par Chapus : “le principe signifie que les juges ne doivent pas avoir de partis pris ou de préjugés en faveur ou à l’encontre d’une des parties. Ils doivent être équanimes et sereins, de façon que les partis n’aient, à titre personnel, rien à craindre et rien à espérer de leurs juges”.

Pb : Quel équilibre a été trouvé entre le rôle du RP et le droit au procès équitable ?

I) L'exercice des pouvoirs du rapporteur public: un obstacle au droit au procès équitable

Le rôle d rapporteur public va être mis à mal du fait d’une possible contradiction avec l’exigence du procès équitable de l’article 6§1 CESDHLF, concernant la non-communication des conclusions du RP aux parties, et pour la participation du RP au délibéré (B)

A) La communication des conclusions du rapporteur public:

* Arrêt Gervaise de 1967 : Le RP n’est pas rattaché au gouvernement malgré sa dénomination. Il est totalement indépendant et doit présenter publiquement les questions présentent dans tous les recours, et en donner des solutions. Donc il n’a rien à craindre de l’administration.
* Puis arrêt Adrassé de 1975 : Le CE vient préciser que lorsque le RP ne prononce pas ses conclusions lors de l’audience, le jugement est entaché d’illégalité. Son rôle est donc primordial.
* Le RP dévoile ses conclusions lors de l’audience, elles sont souvent orales et ne sont pas communiquées avant qu’il les présente aux parties. On peut penser qu’il n’y a pas de problème d’égalité des parties, puisque tout le monde a connaissance de ses conclusions au même moment.
* Mais pourtant, il y a quand même des personnes qui ont jugé cela inégal. D’où l’arrêt Esclatine de 1998 : La requérante invoquait que le fait que les conclusions n’étaient pas communiquées aux parties était contraire au principe du contradictoire énoncé à l’article L.5 du CJA, comme principe fondamental du contentieux administratif. Le principe du contradictoire impose que les parties soient en mesure de connaître tous les éléments du procès durant l’instruction. Le CE va décider que d’une part, le RP est un juge de la juridiction administrative, donc il n’est pas partie au procès. Il a pour rôle de présenter, en toute indépendance et publiquement, ses conclusions sur l’affaire, et d’en donner une proposition de solution argumenté. Ainsi, n’étant pas partie au procès, il n’est pas soumis au principe du contradictoire. D’autre part, le principe du contradictoire n’a lieu que durant l’instruction, comme le dit le CJA, donc pas durant l’audience durant laquelle le RP présente ses conclusions.
* De plus, deux pratiques ont lieu depuis un certain nombre d’année. Ce sont la demande préalable au RP et la note en délibéré. La première a pour but de demander au RP le sens général de ses conclusions avant l’audience. La seconde consiste pour les parties à répondre aux conclusions du RP par une note qui sera transmise à la formation de jugement avant le délibéré.
Mais cet arrêt Esclatine a été pris avant que la CEDH ne se soit prononcée.

B) La participation au délibéré controversée :

* Lors du procès administratif, la dernière phase est le délibéré. C’est le moment durant lequel les juges se réunissent pour débattre de la solution à donner au litige. Le délibéré est secret, comme l’indique l’article L.8 du CJA, afin de préserver l’indépendance des juges. C’est donc hors de la présence des parties et des avocats que les juges décident de la solution. C’est alors posé la question de savoir si le RP, qui est un magistrat de la juridiction administrative, peu participer au délibéré.
* Initialement, la question ne c’était pas posée et le RP se retirait pour débattre, mais il ne prenait pas part au vote.
* En 2001, la CEDH va être saisit de cette question dans l’arrêt Kress contre France. La requérante estimait que le RP ayant publiquement pris partis contre elle lors de l’audience, ne pouvait pas se retirer de manière impartial au délibéré, sans influencer les autres juges. Elle estimait donc que c’était contraire au droit au procès équitable, et donc contraire à l‘article 6§1 de la CESDHLF qui l’impose.
* Le Gouvernement va dire que d’une part le RP est un juge comme les autres, donc il bénéficie aussi de la présomption d’impartialité. ‘autre part, il va dire que la participation du RP au délibéré est nécessaire, car c’est lui qui permet une stabilité de la jurisprudence. De plus il contribue vivement à l’évolution de la jurisprudence lorsque cela devient nécessaire. Il permet aussi d’éclairer les juges sur certains points du droit administratif ou jurisprudentiels.
* La CEDH va répondre qu’elle doute que le statut du RP soit strictement le même que celui des autres juges, car contrairement à eux, il ne vote pas au délibéré et il présente son opinion publiquement avant le délibéré.
Mais la CEDH ne va pas remettre en cause l’indépendance et l’impartialité du RP, qui sont définies dans le CJA. Elle va se fonder sur la théorie des apparences. Elle va dire que dès lors que le RP c’est prononcé publiquement en défaveur du requérant, celui-ci peut avoir un doute légitime quant à son impartialité lors du délibéré. Il pourra alors influencer les autres juges.
* Ainsi, la CEDH va décider que la participation du RP au délibéré est contraire à l‘article 6§1 de la CESDHLF.

Ainsi, pour la communication des conclusions du RP aux parties, la CEDH ne s’étend pas prononcé avant l’arrêt Esclatine, c’est la seule vision du CE de la CESDH qui va s’appliquer avant l’intervention de la CEDH. La participation du RP au délibéré est jugée contraire à l’article 6§1 CESDHLF, et cet arrêt Kress va être le commencement d’un long conflit entre le CE et la CEDH.

II) La diminution de la contradiction avec l'art 6§1 de la CESDHLF :

En ce qui concerne la communication des conclusions du RP aux parties, la CEDH va accepter la conformité du système français par rapport à l’article 6§1. Mais pour la participation du RP au délibéré, la fin de la contradiction avec le droit au procès en toute impartialité, va être beaucoup plus longue.

A) La prise de position de la CEDH sur la communication des conclusions du RP

* C’est dans le même arrêt Kress de 2001, que la requérante va invoquer, comme l’avait fait Mme. Esclatine, l’illégalité quant à la non communication des conclusions du RP aux parties, mais cette fois sur le fondement, non pas du principe du contradictoire, mais sur le droit au procès équitable issu de l’article 6§1 de la CESDH.
* La requérante estimait donc qu’elle n’avait pas eu les moyens de connaître les conclusions du RP, ce qui lui empêchait de pouvoir y répliquer lors de l’audience. Ainsi, le RP ayant publiquement pris position contre elle, Mme. Kress estimait ne pas avoir eu les moyens suffisant pour se défendre une fois l’intervention du RP terminée.
* Le Gouvernement va reprendre les mêmes arguments que le CE avait développé dans l’arrêt Esclatine.
* Cependant, la CEDH va estimer qu’en pratique, Le fait que le RP ne communique pas ses conclusions au parties avant l’audience est contraire au principe du procès équitable, car les parties n’ont pas à leur disposition les moyens nécessaire pour se défendre.
* Cependant, la CEDH va regarder ce qui se passe en pratique. Elle va voir les deux pratiques vues précédemment. Elle estime que le fait que les parties puissent prendre connaissance du sens général des conclusions du RP avant l’audience, et qu’elles puissent y répondre par la note en délibéré, avant que les juges ne délibère, cela est suffisant pour garantir le droit au procès équitable. Les parties sont donc amenées à pouvoir se défendre face aux arguments du RP. Le fait que la CEDH fasse primer la pratique réelle sur la théorie, permet de conserver les particularités de chaque Etat, quant à la manière de mettre en oeuvre leur service public de la justice.
* Le Gouvernement va se dépêcher de formaliser ces deux pratiques, pour éviter de voir la responsabilité de la France engagée par la CEDH si ces pratiques venaient à disparaître.
* Ainsi, par un décret de 2005, l’article R.731-3 est crée et permet la note en délibéré. Le CE va même au fil du temps préciser que les juges sont obligés de prendre connaissance de ces notes, et doivent rouvrir l’instruction si elles contiennent des circonstances de fait que la partis n’avait pas été en mesure d’invoquer, ou si elles contiennent des circonstances de droit nouvelles.
* Pour ce qui est de la demande préalable au RP, c’est le décret du 1er février 2009 qui institue les articles R.711-3 pour les TA et CAA, et R.712-1 pour le CE.
* Au fil du temps, cette demande préalable ne va plus porter que sur le sens général des conclusions du RP, mais aussi sur le dispositif qu’il entend prononcé et les moyens qu’il invoque. Ainsi, il a aussi désormais une obligation d’informer les parties en cas de changement dans les conclusions qu’il leur avait communiqué.
Donc finalement, on se rapproche un peu de l’obligation de communication des documents aux parties grâce à l’article 6§1 de la CESDHLF.


B) Le long conflit entre la CEDH et le CE concernant la participation du RP au délibéré :

* Suite à l’arrêt Kress et au principe dégagé par la CEDH que le RP ne peut plus participer au délibéré, le Président de la section du contentieux du CE va adresser une note aux TA et CAA en 2001, dans laquelle il dit que le RP assiste au délibéré mais n’y participe plus.
* En réalité, il va jouer sur l’interprétation à donner à l’arrêt Kress. Est ce que la CEDH souhaite que le RP ne prenne plus part au débat ou qu’il ne soit plus présent lors du délibéré? Pour le CE, la participation passive du RP est la bonne solution. On voit bien que l’on souhaitait préserver l’institution du RP, en lui permettant toujours d’assister au délibéré. Cependant, on peut se demander si c’est bien légitime, car s’il ne fait plus qu’écouter le débat, il n’a plus un rôle de conseil auprès des juges.
* La CEDH va condamner cette solution dans plusieurs arrêts, dont notamment l’arrêt Théraude c/ France de 2002 et dans l’arrêt Loyen c/ France de 2005.
* La France va pourtant formaliser l’interprétation du Président de la section du contentieux dans un décret de 2005, qui instituait l’article R.731-7 dans le CJA. Il disait que le RP assiste au délibéré mais ne participe pas.
* La CEDH va alors taper du poing, et dans son arrêt Martinie c/ France de 2006, elle va mettre fin à la controverse sur l’interprétation de la jurisprudence Kress. La Cour va dire que la participation, qu’elle soit active ou passive, du RP au délibéré, est contraire à l’exigence d’impartialité de l’article 6§1 CESDHLF.
* La France va alors être contrainte d’adopter une solution différence dans le décret du 1er juillet 2006. Ce dernier va mettre fin au décret de 2005, et va dire que devant les TA et CAA, le RP n’assiste plus au délibéré (article R.732-2 CJA), mais devant le CE, le RP assiste au délibéré sauf demande contraire de l’une des parties (article R.733-3 CJA).
* Le CE va dans l’arrêt Courty de 2007 dire que le décret de 2006 et conforme à l‘article 6§1 de la CESDHLF. De son côte, le Conseil Européen va voter une résolution de l’arrêt Kress dans laquelle il donne un brevet de conformité entre le décret de 2006 et l’article 6§1.
* La CEDH va même préciser qu’une partie ayant été informée de la possibilité de refuser la présence du RP au délibéré, rend la requête irrecevable (arrêt Mme. Etienne c/ France de 2009).
* Ainsi, le conflit entre la CEDH et la France est clos, sur un compromis plus ou moins critiquable. Pourquoi accepter que le RP puisse assister au délibéré, sauf avis contraire des parties, uniquement devant le CE et non devant les TA et CAA (question de prestige?).


Merci beaucoup pour votre aide!