Critères du contrat administratif

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Article publié par Nicolas_Mas.

Fiche sur les critères du contrat administratif

( dernière mise à  jour par Mathou le 21/07/2005 )


Il s'agit de la qualification des contrats de l'administration : Contrat de droit public ou contrat de droit privé ?
La Nature du contrat est déterminée :

soit par la loi (I)
soit par le juge administratif (II)

{{ I - Contrat fixé par la loi }}

- Il peut être privé ;
- Il peut être administratif :

Cas des contrats relatifs à  l'exécution de travaux publics : Loi du 28 pluviose an VIII

Cas des contrats relatifs à  l'occupation du domaine public : Décret-loi du 17 juin 1938

Le Contrat est administratif à  raison de son objet.
[REM] : Le contrat administratif pourrait résulter tout autant de critères jurisprudentiels.

{{ II - Contrats dont la nature est déterminée par la jurisprudence }}

IE : Réunion d'une condition organique associée à  une condition matérielle.

{A - Condition organique : deux personnes publiques.}

Principe : TC UAP 1983 : Présomption de caractère administratif du contrat. Réfragable : "le contrat sera de droit privé si et seulement si en raison de son objet il ne fait naitre entre les parties que des rapports de droit privé".

Infra : Les contrats passés entre un spic et ses usagers sont des contrats de droit privé.
Idem pour les contrats de location : CE 1998 BAS de Blénod-Les-Ponts-Mousson

{B - Cas du contrat passé entre deux personnes privées}

Principe :" le contrat est de droit privé et ce même si ces personnes privées sont chargées d'une mission de service public". CE 1991 Association Girondins de bordeaux FC.

Exception : La personne privée agit pour le compte d'une personne publique :

- Soit en vertu d'un mandat de service public
- Soit la personne privée est contrainte par la personne publique de contracter : On parle alors de " téléguidage " selon la formule consacrée par le doyen Chapus :

Premier temps de l'évolution de jurisprudence : TC 1963 entreprises Peyrot (Société d'Economie Mixte), concession d'autoroute o๠le concessionnaire agit pour le compte de l'Etat.

Puis double extension :
CE 1989 Société des autoroutes de la région Rhône-Alpes : Société entièrement privée.
CE 1975 Société d'équipement de la région de Montpellier : Autres domaines que la concession d'autoroute.

Dès lors le contrat ne peut être qualifié d'administratif que si l'un des critères alternatifs est satisfait.

{C - Contrat passé entre une personne publique et une personne privée.}

Le caractère " personne publique " de l'un des contractants est une condition ni nécessaire ni satisfaisante pour rendre le contrat administratif : Il faut un critère alternatif : CE 1956 Epoux Bertin.

1°) Critère de la clause exorbitante :

En fonction du contenu du contrat :

Principe : CE 1912 Société des granites porphyroïdes des Vosges : " La clause exorbitante de droit commun traduit la volonté des parties de se lier au régime administratif ".

Exceptions :

Contrat passé entre un SPIC et un usager : TC Bertrand 1962 : " Le contrat est de droit privé même en présence d'une clause exorbitante ".

Contrat passé entre un SPIC et un agent du SPIC : CE 1923 Robert Lafreygère ; TC 1983 Beck.

On distingue trois expressions de clause exorbitante de droit commun :
a°) La clause est exclue dans les relations privées
b°) La clause est inhabituelle dans les contrats de droit privé tant elle est inégalitaire : TC 1980 Société d'exploitation du tourisme de Haute Maurienne.
c°) La clause renvoie à  un cahier des charges qui comporte lui-même des clauses exorbitantes : CE 1981 Commune de Borce.

2°) Critère tiré de l'exécution même d'un service public :
Le contrat est administratif à  raison de son objet.
TC 1978 société de boulangerie de Kourou : " Possible avec un SPIC si le cocontractant n'est ni un usager, ni un agent du SPIC ".
Principe : Le critère classique de la concession de service public est posé par l'arrêt du CE 1910 Thérond.
Extension : Le contrat à  pour objet l'exécution même du service public dans deux hypothèses :
- CE 1958 Bertin : " Le contrat confie à  la personne privée le soin d'exécuter le service public ".
- CE 1958 Grimouard : " Le contrat est en lui-même une modalité d'exécution du service public ".

Cas particulier des contrats d'engagement des personnes participant à  l'exécution d'un service public administratif (SPA) :
CE 1954 Vingtain et Affortit " Le contrat est de droit privé (principe) sauf si il y a une participation directe (exception), le contrat sera administratif ".

Or ce principe et son exception sont créateurs d'au moins un problème matérialisé par l'appréciation au cas par cas qui est de facto laissée au juge et qui amène logiquement à  des différences de jugement : CE 1991 Troquet et TC 1991 Selli, qui sur une question identique adoptent pourtant des solutions opposées.
Un autre problème se pose lorsque l'agent contractuel change de mission en cours d'exécution du contrat :L'une est une mission de SPA, l'autre non : Laquelle doit déterminer la nature du contrat d'engagement ?
La jurisprudence dans un premier temps subordonne la compétence du juge administratif ou judiciaire à  la période concernée : TC 1963 Mazerand. Cette solution n'est pas satisfaisante : la jurisprudence CE 1954 Vingtain Affortit est abandonnée en deux étapes :

1 - CE 1990 Sallièges : " En cas de succession de missions, on ne considère que la dernière en date pour connaître le juge compétent "
2 - TC 1996 Préfet de la région Rhône Alpes : " Tous les agents contractuels d'un SPA sont des agents de droit public ". Suivi par CE 1996 commune de Sérestre : " Cette solution (TC 1996) ne vaut que pour les SPA gérés par des personnes de droit public ".

3°) Critère de la clause exorbitante.
Le contrat est administratif à  raison de son régime.

Principe : CE 1973 Société d'exploitation électrique de la rivière du Sant : On sait à  l'avance que le contrat est soumis à  certaines règles de droit public. On en déduit le caractère administratif du contrat afin de lui appliquer les autres règles du régime du contrat administratif.

[REM]
Par analogie, peut on déduire de ce principe que tous les contrats de marché public sont des contrats administratifs car soumis au code des marchés publics ?
Principe : NON. Le choix du régime est laissé par le juge tant judiciaire qu'administratif aux cocontractants :
Cass. 1 ère Civ. 1996 Société Lockunivers et TC 1999 commune de Sauve.

Ce principe pose trois problèmes :

Une complexité certaine.

Un dualisme juridique possible pour un même contrat.

Diverses possibilités d'interprétation du code des marchés publics.

Aucune de ces trois raisons n'étant souhaitables, le législateur a posé avec la loi du 11 décembre 2001 " MURCEF " article 2 le caractère administratif systématique des contrats pris en vertu du code des marchés publiques.