[Arrêt] Notion de service public

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Bonsoir,

Je souhaite obtenir une confirmation sur une point de méthodologie que je semble avoir entendu, avant de me lancer dans l'élaboration de mon plan définitif.

CAA Nancy, 30 Septembre 2013, 12NC000735 (ci-après)

En l'espèce, je ne dois pas commenter le troisième considérant, puisqu'il s'agit d'un texte de loi. Je l'évoque en tant que justification, mais je ne commente pas le texte de loi en lui même, uniquement les propos du juge ?

Merci d'avance,

Considérant que par une convention conclue le 20 octobre 2009, le Syndicat intercommunal mixte Cablimages a confié à la société NC Numéricâble la conception, la construction et l'exploitation d'un réseau de communications électroniques sur le territoire des communes de Chantraine, Dogneville, Epinal et Golbey pour offrir la possibilité à la population de ces communes d'accéder au très haut débit ; que la société France Telecom demande l'annulation du jugement du 21 février 2012 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce contrat ; que dans le dernier état de ses écritures, le syndicat mixte Cablimages conclut au rejet de la requête ;

Considérant que l'objet de la convention conclu le 20 octobre 2009 est de confier à la société attributaire " la charge de la conception, du financement, de la construction et du déploiement " d'un réseau de communications électroniques sur le territoire des communes de Chantraine, Dogneville, Epinal et Golbey ; qu'aux termes de l'article 6.1 de la convention : " les infrastructures constituées de câbles coaxiaux et de leurs accessoires, situées en aval de noeuds optiques et servant la desserte des clients finaux ne sont pas des ouvrages du réseau " ; qu'aux termes de l'article 15 de la convention : " la société est autorisée à exploiter pour son propre compte le Réseau dans le respect des dispositions légales et réglementaires en vigueur pour une offre de service à des clients finaux (service de télévision, accès internet, téléphonie...) ou non (opérateurs de communications électroniques) " ; que le dernier alinéa de ce même article précise que " la société n'est tenue que de la réalisation d'un réseau permettant et supportant les services ci-dessus énumérés et demeure libre du choix des services proposés à ses clients au moyen du réseau " ; que la convention met ainsi à la charge de la société NC Numéricâble le financement, la construction et le déploiement d'un réseau de fibres optiques entre une tête de réseau et des noeuds de raccordement ; que si le contrat autorise au surplus l'attributaire à délivrer directement des services aux utilisateurs finaux, il ne bénéficie d'aucune exclusivité à ce titre ; que le tribunal n'a donc pas dénaturé les faits en estimant que le contrat avait à titre principal pour objet la construction et l'exploitation d'un réseau de communications électroniques -offre de gros- et non pas la fourniture de services de communications électroniques à des clients finaux -offre de détail- ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du 1er alinéa de l'article L. 1411-1 du code général des collectivités territoriales : " Une délégation de service public est un contrat par lequel une personne morale de droit public confie la gestion d'un service public dont elle a la responsabilité à un délégataire public ou privé, dont la rémunération est substantiellement liée aux résultats de l'exploitation du service. Le délégataire peut être chargé de construire des ouvrages ou d'acquérir des biens nécessaires au service " ; qu'aux termes de l'article L. 1425-1 du même code : " I.- Les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent, deux mois au moins après la publication de leur projet dans un journal d'annonces légales et sa transmission à l'Autorité de régulation des communications électroniques, établir et exploiter sur leur territoire des infrastructures et des réseaux de communications électroniques au sens du 3° et du 15° de l'article L. 32 du code des postes et communications électroniques, acquérir des droits d'usage à cette fin ou acheter des infrastructures ou réseaux existants. Ils peuvent mettre de telles infrastructures ou réseaux à disposition d'opérateurs ou d'utilisateurs de réseaux indépendants. L'intervention des collectivités territoriales et de leurs groupements se fait en cohérence avec les réseaux d'initiative publique, garantit l'utilisation partagée des infrastructures établies ou acquises en application du présent article et respecte le principe d'égalité et de libre concurrence sur les marchés des communications électroniques. Dans les mêmes conditions qu'à l'alinéa précédent, les collectivités territoriales et leurs groupements ne peuvent fournir des services de communications électroniques aux utilisateurs finals qu'après avoir constaté une insuffisance d'initiatives privées propres à satisfaire les besoins des utilisateurs finals et en avoir informé l'Autorité de régulation des communications électroniques. Les interventions des collectivités
s'effectuent dans des conditions objectives, transparentes, non discriminatoires et proportionnées. L'insuffisance d'initiatives privées est constatée par un appel d'offres déclaré infructueux ayant visé à satisfaire les besoins concernés des utilisateurs finals en services de communications électroniques. II.- Lorsqu'ils exercent une activité d'opérateur de communications électroniques, les collectivités territoriales et leurs groupements sont soumis à l'ensemble des droits et obligations régissant cette activité. Une même personne morale ne peut à la fois exercer une activité d'opérateur de communications électroniques et être chargée de l'octroi des droits de passage destinés à permettre l'établissement de réseaux de communications électroniques ouverts au public. Les dépenses et les recettes afférentes à l'établissement de réseaux de communications électroniques ouverts au public et à l'exercice d'une activité d'opérateur de communications électroniques par les collectivités territoriales et leurs groupements sont retracées au sein d'une comptabilité distincte. (...) " ;

Considérant qu'il ne résulte, ni des termes de l'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales, ni des travaux parlementaires qui ont précédé l'adoption de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 dont ils sont issus, que le législateur a entendu ériger l'établissement et l'exploitation par les collectivités territoriales et leurs groupements d'un réseau de communications électroniques sur leur territoire en un service public local ; que la société France Télécom n'est par suite pas fondée à soutenir que les contrats d'établissement et d'exploitation d'infrastructures de réseaux de communications électroniques sur le territoire des collectivités territoriales constitueraient des conventions de délégation de service public par détermination de la loi ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'indépendamment des cas dans lesquels le législateur a lui-même entendu reconnaître ou, à l'inverse, exclure l'existence d'un service public, une personne privée qui assure une mission d'intérêt général sous le contrôle de l'administration et qui est dotée à cette fin de prérogatives de puissance publique est chargée de l'exécution d'un service public ; que, même en l'absence de telles prérogatives, une personne privée doit également être regardée, dans le silence de la loi, comme assurant une mission de service public lorsque, eu égard à l'intérêt général de son activité, aux conditions de sa création, de son organisation ou de son fonctionnement, aux obligations qui lui sont imposées ainsi qu'aux mesures prises pour vérifier que les objectifs qui lui sont assignés sont atteints, il apparaît que l'administration a entendu lui confier une telle mission

Considérant que si la société NC Numéricâble s'engage " à garantir l'utilisation partagée des infrastructures de fibre optique disponible et à respecter le principe d'égalité et de libre concurrence sur les marchés de communications électroniques " et doit informer annuellement Cablimages " sur l'utilisation du réseau et l'activité commerciale ", celui-ci n'exerce cependant aucun contrôle effectif sur les modalités d'accès des autres opérateurs de communications électroniques au réseau et sur les tarifs susceptibles de leur être appliqués ; que, de même, aucune stipulation de la convention ne détermine le prix ou les modalités de fixation du prix devant être pratiqués à l'égard des clients finaux ; que le " comité de suivi " institué à l'article 21, qui est composé à parité de représentants des deux parties, a seulement pour objet de suivre l'exécution des travaux, d'échanger les informations nécessaires à la bonne exécution de la convention et d'évoquer le cas échéant toute question relative à la mise en cohérence des réseaux d'initiative publique ou à la mise en oeuvre des services mentionnés à l'article 15 ; qu'il ne saurait, dans ces conditions, révéler l'instauration d'une surveillance du Syndicat sur les activités de sa cocontractante ; que les obligations faites à la société concessionnaire de recueillir l'accord préalable du Syndicat avant la réalisation de certains travaux, notamment lorsqu'ils nécessitent des investissements dont le coût d'amortissement excèderait le terme de la convention ou impliqueraient des changements structurels du réseau, et de déployer le réseau de manière homogène sur l'ensemble du territoire des communes concernées, y compris les zones potentiellement non rentables, correspondent à celles que la collectivité publique peut imposer dans l'intérêt d'une exécution de l'ouvrage conforme aux besoins qu'elle a entendu satisfaire ; qu'aucune des stipulations des articles 28 et 29, régissant les modalités d'entrée en possession des biens par le Syndicat, ne sont incompatibles avec la qualification de concession d'ouvrage public ; qu'enfin, compte tenu de la nature de l'ouvrage concerné, l'obligation faite à la société NC Numéricâble d'adapter le réseau aux besoins des clients et aux évolutions technologiques, à l'exception des modifications structurelles, ne suffit pas à caractériser la volonté du Syndicat intercommunal mixte Cablimages de confier à la société NC Numéricâble, sous son contrôle, l'exploitation d'une activité de service public ; (…)