Cas pratique sur le fait d'autrui

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Bonjour,

J'ai un cas pratique à faire en droit des obligations, et je rencontre quelques difficultés. Voici l'énoncé :

Thomas, agé de 15ans, se rend au cours de l'été 2009 en Corse avec son club sportif pour une durée de 3 semaines. MAIS au cours d'un entrainement, il blesse l'un de ses coéquipiers au cours d'une phase de jeu et lui fracture le genou. Pierre, un entraineur, chargé de surveiller l'entrainement, n'était pas présent sur les lieux au moment de l'incident car il téléphonait à sa petite amie; de ce fait, il n'a pas pu prodiguer les premiers soins et sa blessure semble s'être aggravée.
-> Les parents de Jacques viennent vous consulter afin de savoir quelles sont les actions dont ils disposent.


Voici ce que je mettrai :

I. Le dommage
-> OK car atteinte portée à Jacques dans sa personne. Le dommage est corporel, certain, direct et personnel.

II. Faits générateurs de responsabilité :

[u:3vip6b9s]Action contre Thomas[/u:3vip6b9s]
-> responsabilité du fait personnel : art 1383, faute de d'imprudence de Thomas. Absence de causes d'exonération.
les parents de Jacques peuvent agir sur le fondement de la responsabilité personnelle, mais ils ont tout intérêt à envisager plutôt la responsabilité des parents de Thomas étant donné que ce dernier a très certainement un faible patrimoine.

[u:3vip6b9s]Action contre les parents de Thomas[/u:3vip6b9s]
-> Responsabilité du fait d'autrui Art 1384 al 4.

[u:3vip6b9s]Conditions [/u:3vip6b9s]:
- enfant mineur,
- exercice de l'autorité parentale.
- La condition de la cohabitation peut poser problème puisque Thomas n'était pas chez ses parents au moment des faits. Mais cela ne pose pas d'obstacle, arrêt Samda : résidence habituelle de l'enfant au domicile de ses parents. Or les vacances n'excluent pas cette cohabitation. De ce fait la victime peut utiliser cet article même si le mineur n'était pas avec eux au moment des faits.
- le fait dommageable des faits : la victime doit prouver le fait dommageable. Preuve de l'illiceité de l'acte est indifférente : Ass Plen 9 mai 1984. Le simple fait causal suffit à engager la responsabilité des enfants.

Effets : Les parents de Thomas sont solidairement tenus responsable du fait de leur enfant sans qu'une faute n'ait à être établie. Arrêt bertrand.
Aucune cause d'exonération possible

-> La responsabilité ne m'a posé pas de problème, par contre celle du club sportif oui.

[u:3vip6b9s]Action contre l'entraineur :[/u:3vip6b9s]

Art 1384 al 1. Il avait un devoir de surveillance, il a commis une faute.
Mais peut on engager sa responsabilité personnelle ? Peut on dire qu'il est lié à un contrat avec le club où il est salarié et avec les parents ?

[u:3vip6b9s]Action contre le club sportif :[/u:3vip6b9s]

la jurisprudence accepte de fonder la responsabilité des associations sportives QUE lorsqu'un membre a commis une faute violant ainsi les règles du jeu.
Mais en l'espèce peut on dire que Thomas a violé les règles du jeu ? on n'en sait rien. çà sera à la victime de le prouver pour engager la responsabilité du club en tant que personne morale.
Est ce que le club est responsable de la faute de son entraineur ? A priori oui ?

MERCI de m'éclaircir

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Le fait de l'entraîneur qu’il soit salarié ou bénévole, relève de la généralement de la responsabilité du club
Toutefois, l’entraîneur a pour obligation d’une part de fournir la prestation éducative attendue, d’autre part d’assurer la protection de l’enseigné contre les atteintes à son intégrité physique et morale.
Ceci entraîne une obligation de sécurité, de surveillance ainsi qu’une obligation de créer des situations pédagogiques en rapport avec les capacités de réalisation de l’enseigné.
Sa responsabilité pourra être engagée si la preuve est apportée qu’il a commis une faute.

Ici, je pense que l'on peut engager la responsabilité de l'entraîneur car il a bien commis une faute en laissant les enfants seuls. Le club est responsable du fait d'autrui (et donc de l'entraîneur) : sa responsabilité peut être engagée, et en retour, je pense que le club pourra prendre des sanctions à son encontre.

Pour ce qui est de la faute, je ne pense pas que Thomas est violé les règles du jeu. La responsabilité civile (article 1382 et suivant du code civil) du sportif à l’égard d’un autre joueur sera ainsi retenue lorsque sera démontré qu’il a adopté un comportement volontaire, déloyal ou reflétant une maladresse caractérisée en violation des règles du sport. (Cour d’Appel de Rennes, 26 juin 1990).
La responsabilité de Thomas ne pourra pas être engagée dès lors qu’aucune faute caractérisée par une violation des règles du jeu n'a pu être relevée.

Bon courage

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Merci beaucoup.

Donc en résumé, les parents peuvent agir en responsabilité du fait personnel ( Thomas ) mais étant donné qu'il n'a pas un grand patrimoine se ne serait pas intéressant.
DOnc ils peuvent aussi agir en responsabilité du fait d'autrui à l'encontre des parents, du club sportif s'il y a eu une faute de la part de Thomas ( ce qui est dur à prouver ), et à l'encontre de l'entraineur également.

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;) oui je pense

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Bonsoir,

Précisez bien qu'il ne s'agit pas en l'espèce d'un club sportif professionnel (dans un tel cas, on appliquerait le régime : commettant / préposé).

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Charte à lire avant de poster.

Pour ceux qui se posent des questions sur les études de droit =).

Magistère Droit des Affaires, Fiscalité, Comptabilité. [Aix-Marseille III].

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Camille Intervenant

Bonjour,

Citation de lili369 :


Thomas, agé de 15ans

les parents de Jacques peuvent agir sur le fondement de la responsabilité personnelle, mais ils ont tout intérêt à envisager plutôt la responsabilité des parents de Thomas étant donné que ce dernier a très certainement un faible patrimoine.

Donc en résumé, les parents peuvent agir en responsabilité du fait personnel ( Thomas ) mais étant donné qu'il n'a pas un grand patrimoine se ne serait pas intéressant.


Ce n'est pas tout à fait ça. Le "patrimoine" de Thomas n'a pas à entrer en ligne de compte, d'autant qu'il n'a probablement aucun "patrimoine" en tant que mineur. Mais c'est bien parce qu'il est mineur qu'il est sous la "tutelle parentale", ce qui veut dire que ses parents exercent "l'autorité parentale". On applique donc directement 1384 C.Civ alinéa 4 :
Citation :


Le père et la mère, en tant qu'ils exercent l'autorité parentale, sont solidairement responsables du dommage causé par leurs enfants mineurs habitant avec eux.

Les parents ne pourront se dégager de cette responsabilité (civile, je le rappelle) que s'ils peuvent faire appliquer 1384 C.Civ alinéa 7 :
Citation :


La responsabilité ci-dessus a lieu, à moins que les père et mère et les artisans ne prouvent qu'ils n'ont pu empêcher le fait qui donne lieu à cette responsabilité.

Or, en matière civile, ils ne pourront le faire que s'ils démontrent qu'ils avaient confié la garde de leur enfant mineur à quelqu'un d'autre, selon 1384 C.Civ alinéa 1er :
Citation :


On est responsable non seulement du dommage que l'on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l'on a sous sa garde.

Donc, voir si la garde de Thomas avait été transférée… au club sportif !
Citation :


…se rend au cours de l'été 2009 en Corse avec son club sportif


Je rappelle qu'en droit civil, "délit" n'a pas le sens qu'on lui attribue en droit pénal, de même que "faute"…

En droit civil, un délit c'est "tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage" (1382 C.Civ, début) et "faute" est l'expression de la "responsabilité", au sens civil du terme, de celui qui a commis le dommage en question : "oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer." (1382 C.Civ, fin).
On parle, ici, de "réparer un dommage", pas de "sanctionner une faute/infraction", comme au pénal.

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Camille Intervenant

Bonjour,

Citation de alex83 :


Précisez bien qu'il ne s'agit pas en l'espèce d'un club sportif professionnel (dans un tel cas, on appliquerait le régime : commettant / préposé).

A mon humble avis, le code civil, en ce qui concerne la responsabilité [u:1fogt2aw]civile[/u:1fogt2aw], donc les 1382 et suivants, ne fait pas du tout ce genre de distinction, notamment le 1er alinéa du 1384.
le club sportif, amateur ou professionnel, avait manifestement organisé un voyage de 3 semaines en Corse, donc a priori sous couvert de la responsabilité [u:1fogt2aw]civile[/u:1fogt2aw] de ses organisateurs pour les participants qu'ils avaient donc sous leur garde. Lesquels organisateurs (donc le club en tant que tel) devaient donc être assurés pour ça.

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Oui, oui, sur le fondement de la responsabilité du fait d'autrui, pas sur 1382.

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Camille Intervenant

Bonjour,
Tout à fait. Mais en gardant bien à l'esprit qu'au sens civil du terme "responsabilité" ne veut pas forcément dire "culpabilité". Un tribunal civil ne s'occupe que de savoir quel a été le "fait générateur du dommage" et qui a "actionné (directement ou indirectement) le générateur du dommage". Point.
Ensuite, intervient éventuellement la notion de "garde" qui, toujours au sens civil, a une acception beaucoup plus large qu'au pénal. Dans ce cas, on parle souvent de "responsabilité sans faute", mais quand on dit ça, on se réfère généralement à la responsabilité au sens pénal du terme (culpabilité) et à la faute au sens pénal du terme aussi (infraction/sanction).
Un tribunal civil ne "sanctionne" pas, il "répare un dommage" (ou plutôt, dit qui doit le faire).

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Alors, oui, d'accord là dessus.

Mais quand on parle de faute (civile)... on pense forcément à... "culpabilité" avant même de penser à "responsabilité".

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Bonjour,

Alors voilà j'ai un cas pratique à faire mais j'ai un problème ..

Mon cas pratique c'est:

Lors d'un accouchement difficile, à la clinique des Lilas, Madame X a été victime d'une grave hémorragie qui a entrainé une stérilité définitive. Elle estime que le fait que la sage femme, Madame Y ne soit pas suffisamment présente à ses côtés, car elle devait gérer deux accouchements en même temps, à contribué à aggraver les choses.

Indiquer les personnes contre qui la victime peut agir et selon quels fondements, ainsi que les recours éventuels.
(Bon j'ai trois cas pratique donc c'est la question pour les 3)

Je pense avoir les éléments mais en fait je n'arrive à articuler mon cas pratique ...

En fait déjà j'ai une question, je voulais savoir(sachant que les étapes c'est qualification des faits, règle de droit applicable, application aux faits, solution) est ce que je peux parler dans "règle de droit applicable" : de 1382 et 1384 al 5 ? Ou, étant donné que la sage femme est reconnu dans un arrêt du 9 novembre 2004 comme une préposé est ce que j'en parle plutôt dans "application aux faits"?

En fait je ne sais pas si on énonce toujours, dans tous les cas, l'article 1382 !
De plus je ne sais pas trop comment annoncer l'article 1384 al 5 :s

J'espère que vous arriverez à me répondre (et à me comprendre ^^) car j'ai beaucoup de mal à avoir un bon raisonnement ..

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Camille Intervenant

Bonjour,
On peut supposer que la sage-femme n'a pas agi de sa propre initiative et qu'il n'est pas interdit dans le règlement de l'établissement qu'une sage-femme s'occupe de deux accouchement en parallèle, ce qui est, autant que je le sache, très courant/usuel dans les hôpitaux et les maternités. Sinon, ça voudrait dire qu'il faudrait autant de sage-femmes que d'accouchements journaliers ou, à l'inverse, une seule sage-femme de service ==> un seul accouchement par jour.


Au fait, pour la petite histoire, une sage-femme à la clinique des Lilas ? La clinique des Lilas n'a pas de service de maternité. Ne pas confondre avec la maternité des Lilas, qui est un autre établissement indépendant du premier (et pas au même endroit).
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Je te remercie pour tout ces renseignements qui vont encore plus me retourner le cerveau ! :p
Mais parcontre c'est bien écrit la clinique des lilas ! (mais je sais que dans l'arrêt de 2004 c'est précisé que la sage femme agissait aussi pour le compte d'une clinique)

Parcontre oui je ferai bien de regarder s'il n'y a pas quelque chose sur le fait qu'elle puisse s'occuper de deux accouchements à la fois, une petite réglementation par exemple !

Mais en fait je voulais surtout savoir s'il était possible d'utiliser dans "règle de droit applicable" l'article 1382 ou s'il fallait utiliser seulement l'article 1384 alinéa 1 et/ou 5.

En tout cas je te remercie, c'était bien gentil de me réorienter sur d'autres questions même si je l'avoue mon esprit est déjà assez torturé par ce cas pratique ^^

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Camille Intervenant

Bonjour,
Mais parcontre c'est bien écrit la clinique des lilas ! (mais je sais que dans l'arrêt de 2004 c'est précisé que la sage femme agissait aussi pour le compte d'une clinique)

Vi. Mais, de toute façon, la maternité des Lilas a bien le statut de clinique privée... De même que la clinique des Lilas !
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Camille Intervenant

Re,
Mais en fait je voulais surtout savoir s'il était possible d'utiliser dans "règle de droit applicable" l'article 1382 ou s'il fallait utiliser seulement l'article 1384 alinéa 1 et/ou 5

Pourquoi ne pas vous inspirer...
arrêt du 9 novembre 2004

de l'arrêt dont vous parlez, et même des deux arrêts de ce jour, qui concernent la même clinique et la même affaire, histoire de distinguer les responsabilités respectives ?

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Alors finalement j'ai peut être trouvé, je suis partit de 1384 al 5 et ensuite j'ai posé les deux conditions: lien de subordination et fait dommageable du préposé ! et j'ai exposé dans fait dommageable du préposé l'article 1382 pour réunir les conditions afin d'engager la responsabilité du préposé donc du commettant et ensuite j'ai mis de Costedoat pour amener sur le tapis l'immunité du préposé et ensuite 2004 pour établir que même en cas d'indépendance professionnelle la sage femme est considérée comme une préposé... et ensuite je peux faire jouer les responsabilités :) enfin je pense que ça va dans le bon sens, enfin j'espère :p

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Camille Intervenant

Bonjour,
Vous faites comme vous voulez, du moment que vous avez bien noté la piste que je vous ai indiquée.
Dans le pourvoi 01-16739, le gynécologue accoucheur a vu son pourvoi rejeté et, à ce que je devine, celui de la clinique itou, alors que dans le pourvoi 01-17168 du même jour et qui traite exactement de la même affaire, la sage-femme a vu son pourvoi accepté et l'arrêt la condamnant cassé.

Avec :

Vu les articles 1382 et 1384, alinéa 5, du Code civil ;

Attendu
que la sage-femme salariée qui agit sans excéder les limites de la mission qui lui est impartie par l'établissement de santé privé, n'engage pas sa responsabilité à l'égard de la patiente ;
(...)
Attendu
que pour condamner Mme Z..., in solidum avec M. de Y..., la Clinique du Saint Coeur et la Mutuelle du Mans assurances IARD au paiement d'indemnités provisionnelles, la cour d'appel relève que la sage-femme dispose d'une indépendance professionnelle qui en fait plus qu'une simple préposée de sorte que sa responsabilité professionnelle peut être recherchée en raison des fautes personnelles commises et que les constatations des experts établissent incontestablement un défaut de surveillance imputable, en premier lieu, à Mme Z..., ayant retardé la découverte d'une souffrance foetale à l'origine des lésions dont souffre l'enfant ;

Qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen :

CASSE ET ANNULE mais seulement en ce qu'il a condamné Mme Z... au paiement d'indemnités provisionnelles bla bla bla...


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