Les faits justificatifs

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Article publié par Yann.

( dernière mise à  jour par Mathou le 22/07/2005 )


{{Les faits justificatifs}}


Lorsque l'infraction est réalisée dans son ensemble, l'auteur doit en vertu du principe de responsabilité pénale être poursuivi, mais ses actes peuvent se justifier par certaines causes prévues par la loi. On appelle ces causes objectives les faits justificatifs qui suppriment l'élément légal de l'infraction. La loi ayant érigé certains faits en infraction elle peut aussi les pardonner lorsque certaines situations qu'elle prévoit semblent ôter le caractère injuste de l'infraction.


{{A-L'ordre de la loi (art 122-4 C.pénal)}}

La loi autorise ou ordonne dans certains cas la commission d'infractions dans le but de satisfaire à  la volonté générale. Il peut s'agir du règlement mais celui-ci ne peut que justifier la fraude contraventionnelle. L'ordre de la loi n'exonère l'auteur des faits que s'il respecte une proportion dans ce que la loi requiert, le devoir de cohabitation d'un mari ne justifie pas le viol de sa femme [Cass.crim 17 juillet 1984, Dalloz 1985.7, note Mayer]. L'autorisation de la loi doit respecter la même proportion, le droit au citoyen donné par l'article 73 du Code de procédure pénale d'appréhender l'auteur de crime ou délit justifie le recours à  la violence mais non un homicide même par imprudence.



{{B-Le commandement de l'autorité légitime}}

Un acte criminel va perdre tout caractère d'infraction lorsqu'il est ordonné par une autorité publique et compétente (autorité judiciaire, militaire ou administrative). Mais deux conditions doivent être réunies, l'autorité doit être légitime et l'ordre ne doit pas être manifestement illégal. Ce qui implique que le subordonné qui exécute un ordre manifestement illégal soit responsable de l'infraction commise. Le caractère manifestement illégal de l'ordre est une question de fait que le subordonné doit déduire de son expérience d'o๠la prise en considération des capacités de réflexion du subordonné.


{{C-La légitime défense (art 122-5 C.pénal)}}

La carence des autorités compétentes et l'urgence justifient dans certaines conditions la défense de soi-même envers l'agression d'autrui. La légitime défense exonère l'auteur de sa responsabilité pénale et civile des conséquences de sa nécessaire protection.


{1-Conditions}

L'agression : sur soi-même ou sur autrui, physique ou morale. Elle peut aussi être dirigée vers les biens mais la légitime défense y est appréciée plus rigoureusement lorsqu'elle s'exerce à  l'encontre de l'intégrité physique de l'agresseur. Elle doit être réelle et non éventuelle (cependant des éléments trompeurs peuvent justifier une légitime défense putative) actuelle et non futur, et injuste c'est-à -dire contraire au droit (l'arrestation régulière des policiers ne saurait justifier la légitime défense).

La défense : toutes les infractions sont permises (crimes, délits) sauf les infractions involontaires et l'homicide pour la légitime défense des biens (art 122-5 al 2, problème de l'autodéfense). La solution peut parfois paraître injuste : en repoussant l'agresseur le défenseur le tue, on a reproché à  la jurisprudence son manque de nuance en confondant volonté de défense et volonté de résultat. La défense doit être nécessaire : la fuite ou le recours à  la police n'étant plus envisageable ; elle doit être volontaire, reste responsable celui qui coupe involontairement les doigts de son agresseur (on peut se demander pourquoi la jurisprudence "couvre" les risques pris par l'agresseur) ; enfin elle doit être proportionnée, il s'agit d'une question de faits, on doit donc vérifier l'adéquation dans la gravité de la réaction à  l'agression.


{2-Preuves}

Elle doit être apportée par celui qui invoque la légitime défense mais le Code a prévu deux exceptions (art 122-6)

- lorsque l'on repousse l'entrée par effraction ou ruse d'un lieu habité

- lorsque l'on se défend d'auteurs de vols ou pillages accompagnés de violences.

Attention il s'agit de présomptions simples qui peuvent se voir opposer la preuve contraire.


{{D-L'état de nécessité(art 122-7 C.pénal)}}

Lorsqu'une personne se trouve dans une situation o๠un danger imminent menace la sauvegarde d'un intérêt supérieur, et que ce danger peut être écarté par la commission d'une infraction, cette personne se trouve face à  un choix difficile. La loi dans certaines conditions va rendre irresponsable l'auteur de l'infraction salvatrice, et ce car l'auteur n'a aucune intention de nuire. De plus la loi ne peut tout prévoir, même si l'état de nécessité laisse un choix à  la personne il faut savoir adopter une obéissance raisonnée à  la loi.


{1-Conditions}

Le danger : il doit être actuel et imminent, porter atteinte à  des intérêts physiques, moraux, patrimoniaux. Cette condition vient d'être rappelée par la jurisprudence récente : une femme ayant volé de la viande pour ses enfants (cf. affaire Ménard, T. corr. Chà¢teau-Thierry, 4 mars 1898, DP 1899.2.329, note Josserand) a été reconnue coupable de vol, ses difficultés financières étant insuffisantes pour caractériser un danger réel et imminent. Il doit être certain et non éventuel (exclusion du danger putatif). Ce danger doit également être injuste, c'est-à -dire qu'il ne doit pas provenir d'une faute antérieure de l'agent ou provenir de l'ordre de la loi (les commandos anti-IVG ne peuvent invoquer l'état de nécessité contre l'avortement légal)

L'acte de sauvegarde : il doit être nécessaire à  la sauvegarde de la personne ou du bien, et se présenter comme le seul moyen d'éviter la réalisation du danger actuel. De même cet acte doit être proportionné, le bien sauvegardé est d'une valeur supérieure voire équivalente au bien sacrifié, l'article 122-7 n'excluant que la disproportion.


{2-Effets}

L'état de nécessité n'est pas un droit, il rend la personne irresponsable pénalement : la responsabilité civile subsiste et reste à  la charge de l'auteur de l'infraction sur le fondement qu'à  la différence de la légitime défense la victime n'est pas la cause du danger. La responsabilité civile peut donc être retenue sur le fondement de l'enrichissement sans cause ou pour faute si l'on admet celle-ci malgré la nécessité.