Le gardien et la responsabilité du fait des choses

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Le terme de gardien est apparu en droit de la responsabilité avec l'avènement de la responsabilité du fait des choses.



Avant de commencer, prenons un exemple. Je suis dans un centre commercial et je glisse sur le sol. Dans ma chute je fait tomber une vieille dame dont la canne lâchée tombe sur la tête d'un petit enfant.



Sur qui et comment je dois fonder mon action en réparation ?



Il faut tout d'abord chercher les articles du Code civil permettant de légitimer ma demande sur des base légales. L'article 1382 évoque que "Tout fait quelconque qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer". Ce principe général de responsabilité suppose une faute, un dommage et un lien de causalité. Quand je tape une personne qui me déplaît, je commet une faute qui entraîne un dommage. Ainsi, on a les composantes de l'article 1382 et la victime pour demander réparation sur ce fondement.



Mais concernant notre cas d'espèce, la seule faute qu'on peut relever est le sol glissant. On pourrait même dire que ce n'est pas vraiment une faute mais plutôt un fait anormal. En effet, ce n'est pas normal de trouver un sol glissant notamment dans un centre commercial réputé pour accueillir de nombreuses personnes à toutes heures de la journées.



C'est dans ce cas et dans de nombreuses autres circonstances similaires que la responsabilité du fait des choses est née. C'est à dire qu'une personne, le gardien est responsable du fait d'une chose dont il a sous la garde. Ce principe a été annoncé par l'article 1384 alinéa 1 du Code civil disposant que "On est responsable non seulement du dommage que l'on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l'on a sous sa garde." A l"origine, cet article était seulement un texte d'annonce mais par manque de base légale la doctrine et notamment Pothier a demandé aux magistrats de prendre en considération cet article pour traiter de la responsabilité du fait des choses.



Cela s'est fait par le biais de deux célèbres arrêts :


Le premier arrêt de la Cour de Cassation se nomme Teffaine ou encore LeRemorqueur et il est rendu le 16 juin 1896. Cet arrêt pose pour la première fois le principe de responsabilité du fait des choses. Mais cet arrêt garde certaines limites notamment en limitant la réparation aux choses dangereuses. En fait, la véritable consécration de cette responsabilité est annoncée par un arrêt Jand'heur du 13 février 1930.


Par l'arrêt Jand'heur, un gardien peut être tenu à réparation sur toute les choses qu'il a sous sa garde indépendamment de sa faute. C'est la responsabilité de plein droit


Mais dans notre exemple, qui est le gardien ?


Cela peut être le propriétaire du centre commercial, le gérant d'un magasin, un vigile ou encore un technicien de surfance. En fait, on doit différencier deux gardes : la garde juridique et la garde matériel.



La garde juridique est fondée sur un titre juridique. Le gardien c'est le propriétaire de la chose. En l'espèce, le gardien est le gérant du centre commercial.
La garde matériel est fondée sur la possession. Est gardien, celui qui a le pouvoir effectif de surveillance de la chose. Ainsi, ce n'est pas forcément le gérant du centre commercial.


Alors comment savoir ?



C'est par un célèbre arrêt Franck du 2 décembre 1941 que la Cour de cassation est venue préciser ce délicat problème. La Cour affirme que le gardien est celui qui a le pouvoir d'usage, de direction et de contrôle de la chose.



Ainsi, la Cour de cassation retient la garde matériel fondée sur la possession au détriment de la garde juridique.



Ainsi, en l'espèce, le gardien du sol est celui qui a le pouvoir d'usage, de direction et de contrôle. C'est contre lui que notre ami le glisseur devra demander réparation.



On peut en outre rajouter que la capacité de discernement du gardien importe peu. C'est à dire qu'un gardien ne sachant pas faire la distinction entre le bien et le mal pourra être poursuivi sur le fondement de la responsabilité du fait des choses car le principal est d'attribuer une dette de réparation à la victime. C'est ce qu'à affirmé la Cour de cassation dans un arrêt Trichard de 1964.



Enfin, il est tout à fait envisageable qu'un gardien puisse concéder son pouvoir de surveillance à un tiers. Cela peut se faire de deux manières : le transfert matériel et le transfert juridique.



Pour le transfert matériel, le tiers est possesseur de la chose. Il a un pouvoir d'usage, de direction et de contrôle et doit se comporter comme le véritable propriétaire de la chose.
Pour le transfert juridique, on opère à un acte juridique formalisant la transmission de la garde.


Ainsi, on assiste à un transfert de responsabilité. Ajoutons enfin que si il y'a une hésitation sur la qualité du gardien, la présomption s'établie sur le propriétaire juridique de la chose en question. Et en l'espèce, il s'agira du gérant du centre commercial.



Mais au final, vous éviterez toute ce questions si vous ne tombez pas sur le sol..

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marianne76 Modérateur

Pour le transfert matériel, le tiers est possesseur de la chose. Il a un pouvoir d'usage, de direction et de contrôle et doit se comporter comme le véritable propriétaire de la chose.
Pour le transfert juridique, on opère à un acte juridique formalisant la transmission de la garde.


Bonjour ,
Ceci n'est pas très clair et me semble même faux
Vous ne pouvez pas dire que pour le transfert juridique on opère un "acte juridique " formalisant une transmission de la garde: la responsabilité délictuelle concerne des faits juridiques et non des actes juridiques.
Par ailleurs, le transfert matériel ne consiste pas uniquement dans le fait qu'un tiers soit possesseur de la chose.
Le principe est que la présomption de garde pèse le propriétaire (application de la garde juridique vous voyez pas d'acte juridique de transmission)
En revanche si le propriétaire démontre avoir perdu l'usage la direction et le contrôle le transfert de garde sera admis, mais encore faut-il que ces 3 éléments soient effectivement transférés entre les mains du tiers. Souvent un tiers qui utilisera une chose qui ne lui appartient pas ne sera pas considéré comme gardien parce que tous les éléments ne lui ont pas été transmis, c'est le cas notamment en cas de prêt d'un bien pour un court laps de temps et un usage déterminé. L'arrêt Franck d'où est issue cette définition est donc un compromis entre la garde juridique et la garde matérielle.

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